Non-paiement des pensions alimentaires : l’expérimentation des actions de soutien a débuté !
L’expérimentation prévue par la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 (AJ fam. 2014. 486), pendant 18 mois, d’un mécanisme de renforcement des garanties contre les impayés de pensions alimentaires dans 20 départements pilotes a débuté le 1er octobre 2014 : Ain, Aube, Charente, Corrèze, Côtes d’Armor, Finistère, Haute-Garonne, Hérault, Indre-et-Loire, Loire-Atlantique, Haute-Marne, Meurthe-et-Moselle, Morbihan , Pas de Calais, Rhône, Saône-et-Loire, Paris, Seine-et-Marne, Territoire de Belfort et La Réunion.
Le Gouvernement a largement communiqué sur l’événement, avant comme au moment de son lancement. Preuve qu’il tient à améliorer le sort de nombreuses femmes (il s’agit souvent d’elles !) qui se retrouvent dans des situations financières préoccupantes, faute pour leur ex-conjoint ou partenaire de régler la pension alimentaire due. Le taux de non-paiement s’élèverait à 40 %.
De façon générale, l’amélioration des décisions rendues par les juges aux affaires familiales est au cœur des réflexions.
Adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale le 27 juin 2014, la proposition de loi relative à l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant (v. notre billet du 8 juill. 2014) entend renforcer, en son article 8 bis, l’exécution des décisions rendues par les JAF, en permettant au parquet de requérir directement la force publique pour faire exécuter les décisions de justice rendues en matière civile.
Citons encore Danièle Ganancia, alors magistrate (devenue médiatrice familiale), qui relevait en 2013 dans les colonnes de l’AJ famille qu’ « il faudrait réfléchir à la solution de créer dans la loi de nouvelles mesures à la disposition des juges aux affaires familiales, en leur donnant des pouvoirs analogues à ceux du juge des enfants, mais destinés à assurer l’exécution et le suivi de leurs décisions. Des mesures qui ne seraient plus « avant dire droit » mais « après dire droit », pour accompagner concrètement la décision, avec des intervenants sociaux et des médiateurs » (AJ fam. 2013. 264 in dossier « Enfant et conflit conjugal »). Le rapport sur la coparentalité rendu public en janvier 2014 poursuit en proposant que le JAF puisse ordonner une mesure d’accompagnement – mise à la charge du parent récalcitrant – dans le cadre d’une décision avant-dire droit ou au fond, si nécessaire, sous astreinte, ainsi qu’un stage de coparentalité, sous astreinte ou en encourant une amende civile. Et le rapport Juston d’ajouter, dans sa proposition n° 22, le recours à la médiation comme mesure d’accompagnement de l’exercice en commun de l’autorité parentale et non seulement comme mesure avant dire droit.
Dans le cadre de l’expérimentation mise en place il y a deux jours, il s’agit surtout de faire en sorte que le parent créancier souffre le moins possible de l’inexécution, plus que de rechercher à contraindre le récalcitrant.
L’expérimentation prévoit :
. la mise en œuvre d’une allocation de soutien familial (ASF) complémentaire qui permettra, au bénéfice du parent isolé éligible à l’ASF, de compléter la pension alimentaire fixée par le JAF jusqu’au niveau de l’ASF.
. le versement de l’ASF dès le deuxième incident de paiement d’une pension alimentaire (et non après deux mois consécutifs). Le communiqué gouvernemental observe, par ailleurs, que « si la pension est versée de façon irrégulière, les droits à l’ASF ne s’ouvrent pas ou alors de façon intermittente : l’expérimentation corrigera cette situation » ;
. le maintien de l’ASF pendant six mois après une éventuelle remise en couple, afin d’éviter une rupture trop rapide des aides (actuellement dès la remise en couple).
L’accompagnement des parents isolés pendant les périodes de divorce et de séparation par les caisses d’allocations familiales (CAF) et les caisses de mutualité sociale agricole (CMSA) sera en outre renforcé (mobilisation de la médiation familiale, aide au parent isolé en cas de difficulté pour obtenir auprès du débiteur les éléments nécessaires à la fixation d’une pension alimentaire par le JAF, renforcement des moyens à disposition des caisses pour recouvrer les pensions alimentaires).
L’article 27, VIII, de la loi du 4 août 2014 impose la transmission au Parlement d’un rapport d’évaluation au plus tard neuf mois avant le terme de l’expérimentation. Seront annexés à ce rapport une évolution comparée du taux de recouvrement de l’ensemble des caisses d’allocations familiales selon qu’elles participent ou non à l’expérimentation et un diagnostic des disparités relevées entre elles.
Dans les départements concernés afin de disposer des éléments utiles à l’évaluation de l’expérimentation et de mesurer ses impacts sur le recouvrement des pensions alimentaires, les organismes débiteurs des prestations familiales, en lien avec les services du ministère de la justice, établiront un suivi statistique informatisé des pensions alimentaires, des créanciers et des débiteurs ainsi que des motifs retenus pour qualifier les débiteurs comme étant hors d’état de faire face à leur obligation d’entretien ou au paiement de la pension alimentaire mentionnés au 3° de l’article L. 523-1 du code de la sécurité sociale.
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