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Sélection jurisprudentielle de la semaine : autorité parentale/assistance éducative/procédure familiale, divorce/DIP, filiation, indivision et succession

07/02/2025

Jurisprudence3Voici les décisions que j’ai relevées cette semaine :

  • Autorité parentale / Assistance éducative / Procédure familiale
  • Divorce / DIP
  • Filiation
  • Indivision
  • Succession

  • Autorité parentale / Assistance éducative / Procédure familiale

Effet dévolutif de l’appel en matière de procédure sans représentation obligatoire (Civ. 2e, 16 janv.2025, n° 22-18.962) – En matière de procédure sans représentation obligatoire, y compris lorsque les parties choisissent d’être assistées ou représentées par un avocat, la déclaration d’appel qui mentionne que l’appel tend à la réformation de la décision déférée à la cour d’appel, sans indiquer les chefs du jugement critiqués, doit être interprétée comme déférant à la connaissance de la cour d’appel l’ensemble des chefs de ce jugement.
Viole les articles 562 et 933 du code de procédure civile la cour d’appel qui, pour constater l’absence d’effet dévolutif de la déclaration d’appel formé par le père contre la décision de confier ses enfants à leur mère et de renouveler la mesure d’assistance éducative,  retient que celle-ci indique que l’appel est formé « contre la totalité » du jugement, sans viser expressément aucun chef du jugement critiqué.

NB – À l’inverse, dans les procédures avec représentation obligatoire, lorsque la déclaration d’appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l’effet dévolutif n’opère pas (Civ. 2e, 30 janv. 2020, n° 18-22.528 , Civ. 2e, 2 juillet 2020, n° 19-16.954). Mais comme le souligne la Cour elle-même un tel degré d’exigence dans les formalités à accomplir par l’appelant en matière de procédure sans représentation obligatoire constituerait une charge procédurale excessive, dès lors que celui-ci n’est pas tenu d’être représenté par un professionnel du droit. La faculté de régularisation de la déclaration d’appel ne serait pas de nature à y remédier (Civ. 2e, 9 sept. 2021, n° 20-13.673).

  • Divorce / DIP

Compétence indirecte des juridictions marocaines en cas de double nationalité franco-marocaine (Civ. 1re, 5 févr. 2025, n° 22-22.729) – L’accueil de l’exception de litispendance internationale prévue au troisième alinéa de l’article 11 de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981 relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire est exclu si la décision à intervenir du juge marocain n’est pas susceptible d’être reconnue en France. Au nombre des conditions de cette reconnaissance, que le juge français doit vérifier avant de surseoir à statuer, figure la compétence indirecte du juge marocain, telle qu’elle est définie aux premier et deuxième alinéas de ce texte.

Cette compétence indirecte est établie lorsque les époux ont tous deux la nationalité marocaine, peu important qu’ils aient également la nationalité française, dès lors que le principe suivant lequel, en cas de cumul de nationalités, la nationalité française est seule prise en considération par les tribunaux français, n’a pas lieu d’être appliqué dans l’examen de la compétence indirecte du juge étranger.

Viole ce texte en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations une cour d’appel qui, pour dire n’y avoir lieu de surseoir à statuer, constate que les deux époux ont la double nationalité franco-marocaine et leur dernier domicile commun en France, de sorte que la juridiction française est compétente pour connaître de leur divorce, puis retient que, si l’époux a saisi en premier lieu la juridiction marocaine, laquelle a prononcé le divorce des époux par un jugement frappé d’appel, celle-ci n’était pas compétente pour ce faire par application de la Convention du 10 août 1981, de sorte que l’exception de litispendance doit être rejetée.

NB – v. Civ. 1re, 23 févr. 2011, n° 10-14.760, AJ fam. 2011. 210, note A. Boiché ; Civ. 1re, 7 nov. 2012, n° 11-14.220, AJ fam. 2013. 133, 2e esp., note A. Boiché.

  • Filiation

Conditions de preuve de la nationalité française par filiation : prise en compte de la résidence des ascendants indirects (Civ. 1re, 22 janv. 2025, n° 23-16.330) – Viole l’article 30-3 du code civil une cour d’appel qui, pour dire qu’un individu n’est pas admis à faire la preuve qu’il a, par filiation, la nationalité française, retient que la condition d’absence de résidence en France pendant plus d’un demi-siècle doit être appréciée uniquement dans la personne de l’ascendant direct, sans prendre en compte la résidence éventuelle en France d’un ascendant indirect, tel que le grand-père paternel, alors que la condition de résidence à l’étranger des ascendants n’est pas limitée aux ascendants directs.

NB – v. Civ. 1re, 27 nov. 2024, n° 23-12.763 ; Civ. .1re, 8 janv. 2025, n° 24-13.921,  24-13.922, 24-13.923 et 24-13.924

  • Indivision

Nécessité pour le juge saisi d’une demande de licitation des biens indivis de vérifier la possibilité de partage en nature (Civ. 1re, 5 févr. 2025, n° 21-15.932) – Ne donne pas de base légale à sa décision au regard de l’article 1377, alinéa 1er, du code de procédure civile, une cour d’appel qui ordonne la licitation de biens immobiliers indivis en se fondant uniquement sur l’absence d’accord des indivisaires sur la manière de procéder au partage, sans rechercher si ces biens pouvaient être commodément partagés en nature.

NB – v. Civ. 1re, 6 mars 2024, n° 22-13.883, AJ fam. 2024 348, obs. J. Casey.

  • Succession

Irrecevabilité du recours en révision pour absence de preuve de fraude (Civ. 2e, 16 janv. 2025, n° 22-14.624, 37 F-D) – Dans une affaire de recel successoral, c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation que la cour d’appel a jugé irrecevable le recours en révision (C. pr. civ., art. 595) formé par la fille du défunt contre ses neveux venant en représentation de son frère prédécédé, en raison de l’absence de preuve de fraude. La cour a relevé que l’opération litigieuse de 1994, concernant l’acquisition immobilière par son frère, ne présentait pas de manœuvres frauduleuses ni d’intention de tromper le juge, et que la seule abstention de ses neveux quant aux modalités de financement ne suffisait pas à établir une fraude.

Appréciation de l’avantage manifestement excessif dans un protocole d’accord (Civ. 1re,, 29 janv. 2025, n° 23-21.150) – En l’occurrence, la défunte avait institué pour légataires universels par parts égales son neveu et ses deux nièces par testament olographe en 2014.  Par un nouveau testament olographe du 20 septembre 2017, elle a déclaré révoquer toutes dispositions testamentaires antérieures et souhaiter que la dévolution légale s’applique. Moins de trois mois plus tard, la défunte est décédée. Ses frères et soeurs ont renoncé à la succession. Le 14 février 2018, les cousin/cousines ont conclu un accord prévoyant, d’une part, que ces dernières entendent renoncer à faire constater l’annulation du testament olographe du 20 septembre 2017, accepter l’application des règles successorales ab intestat et, en conséquence, signer l’acte de cession des actions des sociétés faisant partie des actifs de la succession et, d’autre part, que le premier accepte de rééquilibrer partiellement l’actif net successoral à leur profit et s’engage à verser à chacune d’elles une somme égale à 5,845 % de l’actif net successoral fixé dans la déclaration de succession (hors contrats d’assurance vie), après déduction des droits de mutation à titre gratuit forfaitairement arrêtés à 45 % et des frais d’actes.

Or en raison de désaccords persistants sur l’exécution du protocole du 14 février 2018 et sur la valorisation de certains éléments d’actif successoral, les cousines ont assigné leur cousin aux fins d’obtenir le partage de la succession de la défunte et sa condamnation à exécuter le protocole du 14 février 2018. Celui-ci leur a opposé sa nullité au nom d’un avantage manifestement excessif. Nullité refusée par la cour d’appel. Ce que confirme la Cour de cassation.

Dans un contrat synallagmatique, l’obtention d’un avantage manifestement excessif au sens des articles 1141 et 1143 du code civil doit être appréciée en tenant compte des avantages obtenus par l’autre partie.

La cour d’appel a relevé que le cousin n’établissait pas qu’il ne disposait d’aucune autre option que la signature du protocole qu’il avait lui-même négocié pendant plusieurs semaines au cours de plusieurs échanges et réunions, notamment pour parvenir au calcul de l’indemnité transactionnelle, et en étant assisté d’un notaire et d’un avocat. Elle a constaté que ses droits en vertu de la dévolution légale étaient plus avantageux que ceux prévus par le testament de 2014, et que l’application de la transaction litigieuse lui était plus favorable que l’annulation du testament de 2017. Ainsi, la cour a jugé que l’avantage obtenu par les cousines n’était pas manifestement excessif, justifiant légalement sa décision.

NB – Cette décision sera commentée dans les colonnes de l’AJ famille par Jérôme Casey.

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