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Sélection jurisprudentielle : divorce, filiation/DIP, indivision, libéralités, nom/prénom

22/11/2024

Jurisprudence3Quelques arrêts intéressants cette semaine :

  • Divorce
  • Filiation/DIP
  • Indivision
  • Libéralités
  • Nom/prénom

 

  • Divorce

Exécution de la prestation compensatoire par attribution d’un droit d’usage et d’habitation temporaire sur un bien propre : pouvoir souverain du juge en cas de consentement du débiteur (Civ. 1re, 20 nov. 2024, n° 22-19.154, 633 F-B) – C’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation qu’une cour d’appel, après avoir évalué à 265 000 € le montant de la prestation compensatoire due par l’époux à l’épouse, et constaté qu’il n’était pas établi que l’époux disposait de liquidités suffisantes pour régler sa dette en capital, accueille la proposition de l’époux de s’en acquitter par l’attribution d’un droit d’usage et d’habitation temporaire d’une valeur équivalente, portant sur un immeuble lui appartenant en propre, occupé par l’épouse avec l’enfant commun, jusqu’à la majorité de celui-ci.

La réserve d’interprétation du Conseil constitutionnel (Cons. const., 13 juill. 2011, n° 2011-151 QPC), selon laquelle l’attribution forcée prévue par l’article 274, 2° du code civil ne peut être ordonnée que si les modalités prévues au 1° ne suffisent pas, ne s’applique qu’en l’absence de consentement du débiteur à l’attribution envisagée. Lorsque le débiteur y consent, le juge retrouve son pouvoir souverain pour déterminer les modalités d’exécution de la prestation compensatoire en capital qu’il estime les plus appropriées.

NB – Le 13 juillet 2011,  le Conseil constitutionnel a validé le dispositif permettant au juge d’attribuer en propriété à un époux, à titre de prestation compensatoire, un bien propre ou personnel de son conjoint sans que son consentement ne soit requis (Cons. const. 13 juill. 2011, n° 2011-151 QPC). Une réserve cependant : cette forme de versement ne constitue une mesure proportionnée au but d’intérêt général que si elle est une modalité subsidiaire d’exécution de la prestation en capital. Dès lors, « elle ne saurait être ordonnée par le juge que dans le cas où, au regard des circonstances de l’espèce, les modalités prévues au 1° n’apparaissent pas suffisantes pour garantir le versement de cette prestation. » Ce dont la Cour de cassation a pris acte (par ex., Civ. 1re, 15 avr. 2015, n° 14-11.575 ; Civ. 1re, 4 juill. 2018, n° 17-22.645, AJ fam. 2018. 469, en sanctionnant des juges d’appel qui avaient attribué un bien sans constater que les modalités prévues au 1° de l’article 274 code civil n’étaient pas suffisantes pour garantir le versement de cette prestation). Aujourd’hui, la Cour affine sa jurisprudence. Cette subsidiarité ne s’impose qu’en l’absence de consentement du débiteur lui-même. Si consentement il y a, le juge retrouve son pouvoir souverain !

  • Droit pénal de la famille

Caractérisation du délit de non-représentation d’enfant malgré l’absence de calendrier fixé par le juge (Crim. 14 nov. 2024, n° 22-85.934, 01362 F-D) – Justifie sa décision la cour d’appel qui déclare coupable de non-représentation d’enfant une mère ayant volontairement fait obstacle à la mise en œuvre effective du droit de visite du père, bien que le juge aux affaires familiales n’ait pas fixé lui-même le calendrier des visites. La cour d’appel a retenu que la fixation des modalités de visite devait intervenir après concertation entre les parents et le responsable de l’espace de rencontre, et que la mère n’a pas présenté l’enfant à l’entretien préalable, empêchant ainsi la définition des jours de visite, ce qui caractérise le délit de non-représentation d’enfant en tous ses éléments constitutifs.

  • Filiation

Exequatur d’un jugement étranger établissant la filiation en l’absence de lien biologique, mais sans adoption plénière (Civ. 1re, 14 nov. 2024, n° 23-50.016, 631 FS-B+R) – L’ordre public international français ne saurait faire obstacle à l’exequatur d’une décision établissant la filiation d’un enfant né à l’étranger à l’issue d’un processus de gestation pour autrui à l’égard d’un parent qui n’aurait pas de lien biologique avec l’enfant, dès lors que les droits fondamentaux sont respectés et que le consentement des parties, notamment de la mère porteuse, est établi. Toutefois, viole l’article 509 du code de procédure civile une cour d’appel qui, en accordant l’exequatur à une décision étrangère établissant une filiation, décide qu’elle produira en France les effets d’une adoption plénière, alors que la décision étrangère n’était pas un jugement d’adoption. La filiation est reconnue en tant que telle en France et produit les effets qui lui sont attachés conformément à la loi applicable à chacun de ces effets, sans qu’il soit possible de la traduire en adoption plénière.

NB – Cet arrêt se situe dans le sillage des précédentes décisions de la Cour de cassation du 2 octobre 2024 (Civ. 1re, 2 oct. 2024, n° 22-20.883AJ fam. 2024. 573, obs. J. Houssier ; 23-50.00123-50.002, 23-50.020 et 23-50.017, AJ fam. 2024. 575, obs. J. Houssier). Mais un cap est franchi : la Cour admet le lien de filiation entre un enfant né d’une GPA à l’étranger et son parent d’intention même sans aucun lien biologique.

  • Indivision

Inversion de la charge de la preuve en matière de copropriété d’un équidé (Civ. 1re, 14 nov. 2024, n° 23-16.221, 611 F-D) – Viole l’article L. 212-9 du code rural et de la pêche maritime et l’article 1353 du code civil une cour d’appel qui, pour rejeter la demande en partage d’indivision qui portait sur un cheval, fait peser sur la coindivisaire la charge d’établir sa copropriété à hauteur de 20 %, alors qu’il résulte de ces textes que les personnes identifiées comme propriétaires dans le système d’information relatif aux équidés (SIRE) sont présumées avoir la propriété des équidés, et qu’il appartient à la personne contestant cette présomption d’en rapporter la preuve.

  • Libéralités

Donation-partage prétendument frauduleuse : prescription de l’action paulienne (Civ. 1re, 14 nov. 2024, n° 22-20.780, 604 FS-D) – A à bon droit déduit qu’une action paulienne engagée le 26 mai 2016 était prescrite (prescription par 5 ans aux termes de l’article 2224 du code civil), la cour d’appel qui a retenu que le créancier ne prétendait ni ne justifiait avoir été frauduleusement empêché d’exercer l’action à compter de la publication de l’acte de vente du 21 mars 2011, mentionnant la donation-partage du 4 mars 2011, et qu’il s’était prévalu d’une créance à l’encontre du donateur depuis au moins l’année 2009, le jugement du 16 septembre 2011 ayant été précédé de plusieurs autres procédures, entre 2009 et 2011, ce dont il résulte qu’il connaissait dès 2009 le principe de sa créance. Sans avoir à s’assurer du caractère certain de la créance pour apprécier la recevabilité de l’action, la cour d’appel a conclu à bon droit que l’action était prescrite.

Nom-Prénom

Changement de prénom d’un enfant : le jeune âge de l’enfant ne fait pas obstacle à la constatation d’un usage prolongé (Civ. 1re, 20 nov. 2024, n° 22-14.773, 632 FS-B) – L’intérêt légitime pour le changement de prénom peut être constitué par l’usage prolongé d’un prénom autre que celui enregistré à l’état civil, apprécié au jour où le juge statue. Viole l’article 60 du code civil une cour d’appel qui rejette la demande de changement de prénom d’un enfant en retenant qu’à l’égard d’un enfant de trois ans, il est difficile de considérer qu’il s’agit d’un usage prolongé et que cet usage n’apparaît pas établi, alors qu’elle a constaté que, au jour où elle statuait, l’enfant était appelé par ce prénom par ses proches. 

 NB – Les juges doivent rechercher si, eu égard aux circonstances de l’espèce, l’état de fait invoqué n’était pas de nature à constituer pour l’enfant un intérêt légitime au changement de prénom (not. Civ. 1re, 14 févr. 1990, no 88-13.94). Et ce, au jour où ils statuent.

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