Au Journal officiel du 21 mai 2020 : nouvelle ordonnance sur la procédure civile
Afin de faciliter la reprise de l’activité juridictionnelle malgré les mesures d’urgence sanitaire prises pour ralentir la propagation du virus covid-19, l’ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 modifie et complète l’ordonnance n° 2020-304 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété (Brève du 26 mars 2020).
Saisies immobilières – L’ordonnance modifie l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-304 afin de prévoir que les délais des procédures de saisies immobilières sont suspendus, non plus jusqu’à la fin de la période juridiquement protégée, mais jusqu’à la date du 23 juin 2020.
Procédure écrite ordinaire et juge rapporteur – L’article 2 modifie l’article 5 de l’ordonnance n° 2020-304 pour imposer un juge rapporteur en procédure écrite ordinaire devant le tribunal judiciaire : « En procédure écrite ordinaire, le juge de la mise en état ou le magistrat chargé du rapport peut tenir seul l’audience pour entendre les plaidoiries. Il en informe les parties par tout moyen. Il rend compte au tribunal dans son délibéré ». Disposition qui s’applique dès lors que la date de l’audience de plaidoirie ou la date de mise en délibéré de l’affaire – dans l’hypothèse d’une procédure sans audience –, est fixée pendant la période juridiquement protégée.
Encadrement de la publicité des débats – L’article 4, à la fois supprime les dispositions de l’article 6 de l’ordonnance n° 2020-304 prévoyant que le président de la juridiction peut décider que les débats se dérouleront en publicité restreinte et, si nécessaire, en chambre du conseil, et crée un article 6-1 pour confier aux chefs de juridiction la définition des conditions d’accès (par voie d’affichage) à la juridiction, aux salles d’audience et aux services qui accueillent du public permettant d’assurer le respect des règles sanitaires en vigueur. Toutefois, « le juge ou le président de la formation de jugement peut décider, avant l’ouverture de l’audience, que les débats se dérouleront en publicité restreinte ou, en cas d’impossibilité de garantir les conditions nécessaires à la protection de la santé des personnes présentes à l’audience, en chambre du conseil. Dans les conditions déterminées par le juge ou le président de la formation de jugement, des journalistes peuvent assister à l’audience, y compris lorsqu’elle se tient en chambre du conseil en application des dispositions du présent article. » Et « lorsque le nombre de personnes admises à l’audience est limité, les personnes qui souhaitent y assister saisissent par tout moyen le juge ou le président de la formation de jugement ».
Dématérialisation des audiences – L’article 5 modifie l’article 7 de l’ordonnance n° 2020-304 qui prévoit la possibilité de tenir des audiences et des auditions de manière dématérialisée. Il supprime l’alinéa qui disposait que, « lorsqu’une partie est assistée d’un conseil ou d’un interprète, il n’est pas requis que ce dernier soit physiquement présent auprès d’elle ». Il étend, pendant la période juridiquement protégée, la possibilité de recourir à tout moyen de télécommunication audiovisuel, voire électronique, y compris téléphonique, aux relations juridictions/techniciens et aux auditions. Et, lorsqu’un moyen de télécommunication audiovisuel ou un autre moyen de communication électronique est utilisé pour tenir une audience ou une audition, les participants à l’audience peuvent se trouver en des lieux distincts. Les moyens de communication utilisés par les membres de la formation de jugement doivent garantir le secret du délibéré.
Procédure sans audience – L’article 6 modifie l’article 8 de l’ordonnance n° 2020-304, qui permet à la juridiction de statuer sans audience, selon une procédure écrite lorsque la représentation par avocat est obligatoire ou que les parties sont représentées ou assistées par un avocat. Il ajoute que la décision de procéder selon la procédure sans audience peut intervenir « à tout moment de la procédure ». Le dispositif s’applique aux affaires dans lesquelles la mise en délibéré de l’affaire est annoncée pendant la période comprise entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus. Le texte précise par ailleurs qu’en matière de soins psychiatriques sans consentement, la personne hospitalisée peut à tout moment demander à être entendue par le juge des libertés et de la détention. L’audition est alors réalisée par tout moyen qui permet de s’assurer de son identité, de la qualité de la transmission et de la confidentialité des échanges..
Publicité des décisions – Les décisions peuvent être portées par tout moyen à la connaissance des parties intéressées et pas seulement à celle des parties à la procédure. Et les convocations et les notifications par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du greffe sont remplacés par une lettre simple. Le rapport souligne que l’article 7 de l’ordonnance (qui modifie l’art. 10 de l’ordonannce n° 2020-304) tire « les conséquences de l’arrêté du 15 avril 2020 qui modifie temporairement l’arrêté du 7 février 2007 fixant les modalités relatives au dépôt et à la distribution des envois postaux en supprimant la signature du destinataire de la lettre recommandée pour y substituer, après vérification orale de sa présence, une déclaration sur l’honneur établie par l’employé chargé de sa distribution attestant de la distribution de la lettre dans la boîte aux lettres ».
Majeurs protégés – Communication du dossier – L’article 8 ajoute un article 11-1 à l’ordonnance n° 2020-304 pour permettre après le jugement que, par dérogation aux articles 1222 à 1223-1 du code de procédure civile, le dossier du majeur protégé soit communiqué par tous moyens (et donc par voie dématérialisée) aux mandataires judiciaires à la protection juridique des majeurs, à l’exception du certificat médical qui ne peut être consulté que suivant les règles énoncées aux articles précités.
Décision du JAF et espace de rencontre – L’article 8 ajoute également un article 11-2 à l’ordonnance n° 2020-304 qui dispose que « la durée des mesures de droit de visite et de remise d’enfant fixées en espace de rencontre par décision du juge aux affaires familiales est réputée avoir été suspendue à compter de la fermeture de l’espace de rencontre et jusqu’à la reprise effective de la mesure par ce service ».
Assistance éducative – Les articles 9 à 12 visent, selon le rapport rectificatif, « à concilier la reprise rapide d’un fonctionnement normal de la justice des mineurs avec le respect des règles de distanciation sociale. Elles prennent en compte les contraintes matérielles liées aux audiences en assistance éducative qui regroupent souvent de nombreuses personnes, mais s’attachent à préserver au maximum les droits des parties. C’est pourquoi l’essentiel des dispositions de l’ordonnance a été conservé, à l’exception de celles qui dérogent au principe du contradictoire s’agissant des mesures de placement et des décisions suspendant ou modifiant les droits de visite et d’hébergement. Ces décisions qui sont les plus attentatoires aux droits des familles, devront donc faire l’objet d’audiences. Le prolongement dans la durée de la crise sanitaire commande également de limiter le renouvellement des autres mesures sans audience à une seule fois par procédure ». Dès lors :
- l’article 13 de l’ordonnance n° 2020-304 est modifié pour limiter la prorogation de plein droit aux seules mesures de milieu ouvert et d’aide à la gestion du budget familial jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la fin de la période juridiquement protégée, tout en précisant que les mesures échues avant le 1er juin 2020 ne sont prorogées que jusqu’au 1er août 2020. Le rapport rectificatif explique que « ceci a pour effet de ne pas proroger trop longtemps les mesures arrivées à échéance dans la première période de l’état d’urgence sanitaire » (du coup le 5° de l’art. 3 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 est supprimé) ;
- l’article 14 de cette même ordonnance, désormais, n’autorise le juge à renouveler qu’une seule fois une mesure éducative sans audience avec l’accord écrit d’au moins l’un des parents et uniquement pour les mesures de milieu ouvert (seuls les art. 375-2 et 375-9-1 restent visés ; l’art. 375-3 est supprimé), et ce sans pouvoir excéder un an. Par ailleurs, le service éducatif doit transmettre au juge l’avis du mineur capable de discernement qui le demande ;
- l’article 19, qui autorisait le juge à suspendre ou modifier un droit de visite ou d’hébergement, sans audition des parties est supprimé.
- le second alinéa de l’article 21, qui permettait de prendre sans contreseing et de notifier par voie électronique au seul service gardien des décisions suspendant ou modifiant des droits de visite ou d’hébergement, est également supprimé.
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