Sélection jurisprudentielle de la semaine : autorité parentale, divorce, libéralités et mariage
Quelques arrêts pour cette fin de semaine :
- autorité parentale
- divorce
- libéralités
- mariage
- AUTORITÉ PARENTALE
L’impossibilité pour un père d’exercer l’autorité parentale pour son enfant né hors mariage viole la Conv. EDH (CEDH, 30 juin 2022, Paparrigopoulos c/ Grèce, n° 61657/16) – Selon le communiqué de presse de la CEDH, un homme « se plaint en particulier de ne pas avoir eu la possibilité, en droit interne, de procéder à une reconnaissance de paternité volontaire, ce qui a eu pour conséquence de limiter sa responsabilité parentale envers sa fille.
Dans son arrêt de chambre, […], la Cour européenne des droits de l’homme dit, à l’unanimité, qu’il y a eu :
Violation de l’article 14 (interdiction de la discrimination) combiné avec l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme
La Cour observe que, à l’époque des faits, la législation interne ne permettait pas au requérant d’exercer l’autorité parentale, même dans le cas où cela aurait été conforme à l’intérêt supérieur de l’enfant. Ce dernier n’a pas non plus pu obtenir une décision judiciaire susceptible de pallier un refus de la mère de consentir au partage de l’autorité parentale, alors même que cette dernière ne niait pas le lien de filiation entre requérant et l’enfant. Pour la Cour, le Gouvernement n’a pas suffisamment expliqué pourquoi, à l’époque des faits, il était nécessaire que le droit interne prévoie cette différence de traitement entre les pères et les mères d’enfants nés hors mariage et d’enfants nés d’un mariage. Elle estime qu’il n’y a pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre l’absence de possibilité pour le requérant d’exercer l’autorité parentale et le but poursuivi, à savoir la protection de l’intérêt supérieur des enfants naturels.
Violation de l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale)
La Cour note que la procédure a duré neuf ans et quatre mois, et que les arguments du Gouvernement ne permettent pas d’expliquer un tel retard. Eu égard à l’obligation positive de faire preuve de diligence exceptionnelle dans des affaires similaires, elle conclut que le laps de temps écoulé ne peut pas être considéré comme raisonnable. »
- DIVORCE
Exemple d’octroi de dommages-intérêts sur le fondement de l’article 266 du code civil (Civ. 1re, 22 juin 2022, n° 20-21.201, 523 F-D) – Ayant relevé que la vie commune avait duré vingt-quatre ans et que l’épouse souffrait, plusieurs années après le départ de l’époux du domicile conjugal, d’un syndrome anxio-dépressif réactionnel, une cour d’appel a caractérisé les conséquences d’une particulière gravité que l’épouse avait subies du fait de la dissolution du mariage.
- LIBÉRALITÉS
Un époux peut faire une donation portant sur le logement familial s’il s’en réserve l’usufruit (Civ. 1re, 22 juin 2022, n° 20-20.387, 524 F-D) – Selon l’article 215, alinéa 3, du code civil, les époux ne peuvent l’un sans l’autre disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille.
Cette règle, qui procède de l’obligation de communauté de vie des époux, ne protège le logement familial que pendant le mariage.
Viole ce texte une cour d’appel qui, alors que la donation de son mari, décédé en cours de procédure de divorce, en faveur de ses enfants issus d’un précédent mariage (portant sur la nue-propriété de biens immobiliers propres, dont l’un constituait le logement de la famille) n’avait pas porté atteinte à l’usage et à la jouissance du logement familial par l’épouse pendant le mariage, accueille la demande de celle-ci en annulation de la donation faite sans son consentement après avoir relevé que celle-ci a la qualité de conjoint successible, au sens de l’article 757 du code civil, et que cette qualité ne peut dépendre des agissements d’un époux à l’encontre de l’autre, mais uniquement de la loi et du régime matrimonial, retient que l’acte de donation du 8 mars 2012 a porté atteinte à l’usage et la jouissance du logement familial par elle de sorte que l’absence de mention du consentement de l’épouse dans l’acte justifie son annulation,
NB – Cette décision a déjà fait l’objet d’un premier arrêt de cassation (Civ. 1re, 22 mai 2019, pourvoi n° 18-16.666) qui avait statué dans le même sens. On comprend que la cassation se fasse dès lors sans renvoi…
- MARIAGE
Mariage polygamique : la seconde épouse a droit au paiement d’une pension de réversion (Civ. 2e, 23 juin 2022, n° 21-11.793, n° 684 F-D) – En cas de mariage d’un assuré, suivi d’un second mariage qui n’a pas été déclaré nul, la seconde épouse a la qualité de conjoint survivant au sens de l’article L. 353-1 du code de la sécurité sociale, de sorte qu’elle doit bénéficier de la pension de réversion.
Viole ce texte, privant d’effets le mariage conclu entre le défunt et la seconde épouse pour cause de bigamie, alors qu’en l’absence d’annulation de ce mariage, la veuve avait la qualité de conjoint survivant, une cour d’appel qui, pour rejeter sa demande de pension de réversion, retient que, par jugement devenu définitif, la seconde épouse a été déboutée de sa demande tendant à voir reconnaître le caractère putatif de son mariage.
NB – Cette décision, dont la solution est vouée à la désuétude, sera commentée à l’AJ famille par Fabienne Jault-Seseke.
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