Sélection jurisprudentielle : autorité parentale, divorce, indivision, libéralité, majeur protégé, régime matrimonial et succession
Une belle brochette d’arrêts avant les vacances !
- autorité parentale
- divorce
- indivision
- libéralité
- majeur protégé
- régime matrimonial
- succession
- Autorité parentale
Retrait de l’autorité parentale : appréciation au jour de la décision et non-soumission aux règles de motivation du code pénal (Crim. 26 mars 2025, n° 24-82.966, n° 403 F-D) – La cour d’appel, en prononçant le retrait de l’autorité parentale de la prévenue sur son fils, a motivé sa décision par la gravité des faits de violences multiples commis sur l’enfant, entraînant des lésions graves. La décision, prise en application de l’article 378 du code civil, de retrait de l’autorité parentale qui ne constitue pas une peine, mais une mesure de protection de l’enfant, de nature civile, n’est pas soumise aux règles de motivation énoncées notamment par l’article 132-1 du code pénal. Et c’est au jour de cette décision que le retrait de l’autorité parentale doit être apprécié et ordonné dans l’intérêt de l’enfant.
Délégation de l’autorité parentale en cas de délaissement parental : obligation de statuer dans la même décision (Civ. 1re, 26 mars 2025, n° 23-10.795, 202 F-D) – Viole l’article 381-2, alinéa 5, du code civil, une cour d’appel qui, après avoir confirmé le jugement prononçant le délaissement parental à l’égard de la mère des enfants mineurs, infirme le jugement pour le surplus et renvoie à une autre décision statuant sur la délégation de l’autorité parentale, alors qu’il lui appartenait de déléguer l’autorité parentale à la personne, à l’établissement ou au service départemental de l’aide sociale à l’enfance ayant recueilli les enfants ou auxquels ils avaient été confiés, par la même décision.
Appréciation de la valeur probante des attestations irrégulières en la forme (Civ. 1re, 26 mars 2025, n° 22-20.677, 203 F-D) – Prive de base légale sa décision au regard de l’article 202 du code de procédure civile une cour d’appel qui écarte des débats des pièces produites par un parent au motif qu’elles ne satisfont pas aux prescriptions formelles de cet article (dactylographiées et non manuscrites), sans apprécier la valeur probante et la portée de ces attestations irrégulières. En effet, les règles qu’il édicte ne sont pas prescrites à peine de nullité, de sorte qu’il incombe au juge saisi d’apprécier la valeur probante et la portée d’attestations irrégulières en la forme.
Droit de visite médiatisé et droit de visite en espace de rencontre : à chaque juge sa compétence (Civ. 1re, 26 mars 2025, n° 23-14.660, 195 F-D) – Viole les articles 373-2-9, 375-3 et 375-7 du code civil ainsi que l’article 1180-5 du code de procédure civile une cour d’appel qui, après avoir jugé que l’autorité parentale s’exercerait en commun et fixé la résidence habituelle des enfants chez le père, décide que la mère disposera d’un droit de visite médiatisé selon les modalités fixées par le juge des enfants, et qu’il lui reviendra de saisir le juge aux affaires familiales après le dessaisissement de ce dernier. En statuant ainsi, en s’en remettant à la décision du juge des enfants sur la durée et les modalités de la mesure, alors que sa décision de ce chef avait vocation à s’appliquer à l’issue du placement, la cour d’appel a méconnu l’étendue de ses pouvoirs.
- Divorce
Altération définitive du lien conjugal : conditions de cessation de la communauté de vie (Civ. 1re, 26 mars 2025, n° 23-12.675, 209 F-D) – Viole l’article 238, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 une cour d’appel qui rejette la demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal en retenant que le délai de deux ans de séparation n’était pas écoulé à la date de l’assignation, alors qu’il ressortait des constatations que les époux résidaient séparément depuis plus de deux ans à cette date. La Cour de cassation, statuant au fond, confirme le jugement de divorce pour altération définitive du lien conjugal, constatant que les époux avaient cessé toute communauté de vie depuis plus de deux ans à la date de l’assignation en divorce.
NB – Le délai de séparation est désormais d’un an.
- Indivision
Indemnité d’occupation d’un bien indivis : nécessité de prouver l’impossibilité d’usage concurrent (Civ. 1re, 26 mars 2025, n° 23-19.685, 206 F-D) – Prive sa décision de base légale au regard de l’article 815-9 du code civil une cour d’appel qui, pour fixer, à la charge du concubin indivisaire, une indemnité pour l’occupation privative et exclusive de l’immeuble indivis, retient que, dès lors que les parties demandent la confirmation de la disposition du jugement entrepris fixant la « date de jouissance divise » au 1er décembre 2016, conformément à leur accord, celui-ci n’est pas fondé à faire valoir que sa concubine ne se trouvait pas dans l’impossibilité d’user de l’immeuble indivis et qu’il ne l’a jamais empêchée d’occuper les lieux. La cour d’appel aurait dû rechercher si l’occupation du bien indivis par l’un des indivisaires excluait un usage concurrent de l’autre.
- Libéralités
Imposition des dons manuels non déclarés : application des articles 757 et 784 du code général des impôts (Com., 2 avr. 2025, n° 23-15.834, 195 F-D) – Justifie légalement sa décision au regard des articles 757, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011, applicable aux dons consentis avant le 31 juillet 2011, et 784 du code général des impôts une cour d’appel qui, constatant que le contribuable n’avait pas rapporté le don manuel du 4 décembre 2009 à la donation du 16 décembre 2010 et que ce don n’a été révélé à l’administration fiscale que postérieurement à cette date, en déduit que les dispositions de l’article 784 ne pouvaient pas fonder l’imposition du don manuel aux droits de mutation à titre gratuit, lequel devait être imposé sur le fondement de l’article 757, sur sa valeur à la date de la révélation.
- Majeur protégé
Assistance obligatoire du curateur pour la personne sous curatelle renforcée qui agit en défense (Civ. 1re, 2 avr. 2025, n° 23-16.509, 223 F-D) – Viole l’article 468, alinéa 3, du code civil une cour d’appel qui déclare l’action de la banque recevable contre une personne placée sous curatelle renforcée, constate la déchéance du terme du prêt, prononce la déchéance de la banque de son droit aux intérêts contractuels et condamne le majeur protégé à lui payer une certaine somme avec intérêts au taux légal sans que le curateur ait été appelé à l’instance pour l’assister. En effet, selon ce texte, la personne en curatelle ne peut introduire une action en justice ou y défendre sans l’assistance de son curateur.
- Régimes matrimoniaux
Recel de communauté et cession d’actions (Civ. 1re, 26 mars 2025, n° 23-14.322, 205 F-B) – Viole les articles 815-3, 1402 et 1477 du code civil ainsi que l’article L. 228-10 du code de commerce, une cour d’appel qui rejette la demande de l’épouse tendant à voir sanctionner au titre du recel de communauté les cessions par l’époux seul des actions de sociétés, en considérant que les parts sociales acquises pendant le mariage pouvaient être cédées par l’époux seul pendant l’indivision post-communautaire, sans information du coïndivisaire.
Et ne donne pas de base légale à sa décision au regard de l’article 1477 du code civil cette même cour qui, pour rejeter la demande de l’épouse, retient que l’affirmation d’une vente à vil prix par l’époux à lui-même est inopérante, alors que ces motifs sont impropres à écarter la possibilité que l’époux ait soustrait au partage la différence entre le prix apparent et la valeur réelle des actions communes cédées.
- Succession
Révocation de donations successives et succession : motivation insuffisante des juges du fond (Civ. 1re, 26 mars 2025, n° 22-20.944, 207 F-D) – N’a pas satisfait aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile la cour d’appel qui, pour condamner in solidum les enfants ayant reçu, avant le divorce de leurs parents et à l’insu de leur défunt père, donation de la nue-propriété d’une villa de la part de leur mère (qui elle même l’avait reçue de son mari), au paiement de la condamnation prononcée contre celle-ci pour résistance abusive (le jugement de divorce, devenu irrévocable, avait constaté la révocation des donations consenties pendant le mariage), n’a pas répondu aux conclusions des enfants selon lesquelles aucune décision de justice exécutoire ne leur avait enjoint de restituer les biens donnés.
De même, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de motivation en ordonnant l’expulsion de l’un des enfants de la villa et en condamnant les donataires à payer une indemnité d’occupation, alors qu’elle avait retenu qu’aucun titre de propriété ne permettait de relier la villa à la succession du défunt, et qu’elle ne pouvait adopter les motifs contraires du jugement initial.
Nullité du testament olographe : nécessité de l’original pour la vérification d’écriture et validité des dispositions post-signature (Civ. 1re, 26 mars 2025, n° 23-14.430, 194 F-D) – Viole les articles 287, alinéa 1, et 288 du code de procédure civile une cour d’appel qui rejette la demande de nullité d’un testament olographe en procédant à une vérification d’écriture à partir d’une copie de l’acte contesté, alors que la vérification doit être effectuée au vu de l’original de l’écrit contesté. Viole également l’article 970 du code civil cette même cour d’appel qui déclare valable le testament olographe dans son intégralité, en retenant que la mention d’un legs, figurant en-dessous de la signature et de la date, n’affecte pas la validité du testament, alors que la signature doit être apposée à la suite du contenu de l’acte pour marquer l’approbation personnelle et définitive du testateur.
Motivation insuffisante de l’arrêt concernant l’intégration d’une créance à la quotité disponible (Civ. 1re, 26 mars 2025, n° 23-12.164 (197 F-D) – N’a pas satisfait aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile la cour d’appel qui, par des motifs inintelligibles équivalant à un défaut de motifs, a décidé que la créance réclamée par les enfants nés de l’union contractée sous le régime de la séparation de biens avec le prédécédé avait intégré la quotité disponible du patrimoine de leur défunte mère, dont ils sont les seuls légataires, et qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur la prescription d’une créance inexistante telle que réclamée par leurs demi-soeurs. Pour ce faire elle a retenu que, pour définir la quotité disponible, il convient de déterminer l’actif net de la succession après déduction de l’entier passif, dont fait partie la créance de la succession du prédécédé à l’égard de la défunte, de sorte que les légataires, bénéficiaires d’un legs portant sur la totalité de la quotité disponible, ne peuvent, sauf à porter atteinte à la réserve héréditaire, se prévaloir de cette créance.
Partage amiable : indemnité de réduction et devoir de conseil du notaire (Civ. 1re, 2 avr. 2025, n° 23-18.930, 212 F-D) – Justifie légalement sa décision au regard de l’article 1240 du code civil la cour d’appel qui, pour rejeter les demandes de l’épouse en responsabilité du notaire, retient que le notaire a informé sa cliente des conséquences de l’intégration partielle des contrats d’assurance vie dans l’actif successoral, en termes d’indemnité de réduction, et a fourni à sa cliente les éléments nécessaires à sa prise de décision quant aux termes de l’accord de partage amiable.
NB – V. le premier arrêt de cassation déjà rendu dans cette affaire : Civ 1re, 9 nov. 2022, n° 21-11.810.
Répartition du passif successoral en cas de démembrement de propriété : application des règles fiscales spéciales (Com., 2 avr. 2025, n° 23-22.537, 182 FS-D) – Il résulte de la combinaison des articles 612 et 870 du code civil et des articles 669 et 777 du code général des impôts qu’en l’absence de partage pur et simple et lorsque l’actif de la succession, grevée d’une dette, a fait l’objet d’un démembrement des droits de propriété, la part nette revenant à l’usufruitier et au nu-propriétaire doit être fixée en répartissant cette dette selon les proportions prévues par l’article 669 du code général des impôts, lequel institue une règle fiscale spéciale de détermination de la valeur des parts successorales de l’usufruitier et du nu-propriétaire, en vue de leur imposition aux droits de mutation à titre gratuit.
Viole, par refus d’application, l’article 669 du code général des impôts et, par fausse application, l’article 612 du code civil une cour d’appel qui déduit de l’article 612 du code civil qu’en cas de démembrement des droits de propriété, l’usufruitier n’est pas tenu au passif successoral, lequel incombe au nu-propriétaire et doit être intégralement déduit de la part de celui-ci pour déterminer l’assiette des droits de mutation dont il doit s’acquitter.
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