Retrait et suspension de l’autorité parentale ou de son exercice : la circulaire
La loi n° 2024-233 du 18 mars 2024, à laquelle l’AJ famille a consacré un dossier complet en deux volets aux mois de juin et juillet/août dernier a posé en principe le retrait de l’autorité parentale en cas de crime ou d’agression sexuelle incestueuse commis sur la personne de son enfant ou de crime commis sur la personne de l’autre parent, a étendu la suspension de droit de l’exercice de l’autorité parentale pour la durée de la procédure pénale et a instauré un nouveau cas de délégation forcée de l’autorité parentale.
La circulaire du 22 août 2024 (NOR : JUSC2419274C) présente les nouveautés et abroge la circulaire du 28 janvier 2020. Elle est complétée de trois annexes :
- annexe 1 : tableau récapitulatif des décisions relatives à la titularité de l’autorité parentale ou à son exercice (suspension, retrait, délégation)
- annexe 2 : trame d’avis de suspension de l’exercice de l’autorité parentale et des droits de visite et d’hébergement
- annexe 3 : trame de notification de suspension de l’exercice de l’autorité parentale et des droits de visite et d’hébergement
Nous avons fait le choix de reproduire la première de ces annexes qui nous semble particulièrement intéressante en pratique.
ANNEXE n°1 – Tableau récapitulatif des décisions relatives à la titularité de l’autorité parentale ou son exercice décisions prononcées par la juridiction civile
DECISIONS PRONONCEES PAR LA JURIDICTION CIVILE | EFFETS | |
Délégation de l’exercice de l’autorité parentale prononcée par le juge aux affaires familiales
(article 377 du code civil)
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La délégation de l’autorité parentale entraîne une délégation de l’exercice de cette autorité et non de la titularité du droit.
La délégation peut être totale ou partielle (délégation de l’exercice de certains attributs uniquement et expressément précisés). A défaut de précision, la délégation est totale (Cass. Civ 1ère, 24 févr. 2006, n° 04-17.090). Le droit de consentir à l’adoption ne peut jamais être délégué (article 377-3 du code civil). |
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Délégation volontaire (alinéa 1er)La délégation volontaire a lieu :- à la demande des parents qui souhaitent déléguer ensemble ou séparément tout ou partie de l’exercice de leur autorité à un tiers, membre de la famille ou proche digne de confiance, ou établissement agréé pour le recueil des enfants, ou l’ASE,et
– lorsque les circonstances l’exigent (appréciation in concreto dans l’intérêt supérieur de l’enfant – Cass. Civ 1ère, 24 févr. 2006, n° 04-17.090).
La désignation de plusieurs délégataires – par exemple, un couple – en qualité de tiers délégataire est possible (Civ. 1ère, 21 sept. 2022, n° 21-50.042). |
Délégation forcée (alinéa 2)La délégation forcée a lieu :- à la demande du particulier, de l’établissement ou du service départemental de l’aide sociale à l’enfance qui a recueilli l’enfant ou d’un membre de la famille ou du ministère public3,et- en cas :
➢ soit de désintérêt manifeste ; ➢ soit d’impossibilité pour les parents d’exercer tout ou partie de l’autorité parentale ; ➢ soit de poursuite ou de mise en examen ou de condamnation même non définitive d’un parent pour un crime commis sur la personne de l’autre parent ayant entraîné la mort de celui-ci ; ➢ soit de diffusion de l’image de l’enfant par ses parents portant gravement atteinte à la dignité ou à l’intégrité morale de celui-ci ; ➢ soit de poursuite ou de mise en examen ou de condamnation, même non définitive, pour crime ou agression sexuelle incestueuse commis par le parent sur son enfant alors qu’il est le seul titulaire de l’exercice de l’autorité parentale.
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Délégation-partage de l’exercice de l’autorité parentale prononcée par le juge aux affaires familiales
(article 377-1, alinéa 2 du code civil) La délégation-partage est ordonnée au bénéfice d’un tiers délégataire afin de lui permettre d’intervenir dans la vie de l’enfant conjointement avec le parent délégant. Cette délégation-partage nécessite l’accord du ou des parents en tant qu’ils exercent l’autorité parentale. |
A l’égard des tiers de bonne foi, le ou les délégants et le délégataire sont réputés agir avec l’accord de l’autre lorsqu’ils accomplissent seuls un acte usuel de l’autorité parentale relativement à la personne de l’enfant. | |
Retrait total de la titularité de l’autorité parentale prononcé par le tribunal judiciaire
(article 378-1 du code civil) – A la demande du ministère public, d’un membre de la famille, du tuteur de l’enfant ou du service départemental de l’aide sociale à l’enfance auquel l’enfant est confié ; – Lorsque les père et mère mettent manifestement en danger la sécurité, la santé ou la moralité de l’enfant (alinéa 1er) : ➢ soit par de mauvais traitements ; ➢ soit par une consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques ou un usage de stupéfiants ; ➢ soit par une inconduite notoire ou des comportements délictueux, notamment lorsque l’enfant est témoin de pressions ou de violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre ; ➢ soit par un défaut de soins ou un manque de direction. ou – Lorsque les père et mère s’abstiennent volontairement pendant plus de deux ans d’exercer les droits et de remplir les devoirs que leur laissait l’article 375-7 du code civil alors qu’une mesure d’assistance éducative a été prise à l’égard de l’enfant (alinéa 2).
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Le retrait total de l’autorité parentale porte de plein droit sur tous les attributs, tant patrimoniaux que personnels, rattachés à l’autorité parentale : perte du droit d’être informé des choix importants relatifs à la vie de l’enfant, de surveiller son éducation, de l’administration légale, des prérogatives fondamentales de l’autorité parentale (consentement au mariage, à l’adoption, à l’émancipation).
Sauf décision contraire, le retrait total s’étend à tous les enfants mineurs déjà nés au moment du jugement. |
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Retrait de l’exercice de l’autorité parentale prononcé par le juge aux affaires familiales
(article 373-2-1 du code civil) Le juge aux affaires familiales peut confier l’exercice exclusif de l’autorité parentale à l’un des parents si l’intérêt de l’enfant le commande, à condition de caractériser concrètement cet intérêt (Civ. 1ère, 13 sept. 2017, n° 16-18.277). La saisine en urgence du juge aux affaires familiales est possible : – par l’assignation à bref délai (article 1137 alinéa 2 du code de procédure civile) ; – en référé, y compris en référé d’heure à heure lorsque le cas requiert célérité (articles 1073 alinéa 2 et 485 du code de procédure civile).
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L’autre parent qui exerce l’autorité parentale a seul le devoir de protéger l’enfant dans sa sécurité, sa moralité et sa santé, de fixer sa résidence, et de conduire son éducation.Le parent privé de l’exercice de l’autorité parentale conserve :
– le droit d’entretenir des relations personnelles avec l’enfant. Le droit de visite et d’hébergement peut toutefois être refusé pour des « motifs graves » (article 373-2-1, alinéa 2 du code civil) ; – un droit de surveillance qui oblige l’autre parent à le tenir informé de tous les choix importants relatifs à la vie de l’enfant afin de lui permettre de contrôler la conformité de ces choix à l’intérêt de l’enfant, et de les contester le cas échéant (article 373-2-1, alinéa 4 du code civil) ; – les prérogatives fondamentales attachées à la titularité de l’autorité parentale (droit de consentir au mariage, à l’émancipation et à l’adoption) ; – l’obligation d’entretien (article 371-2 du code civil). |
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DECISIONS PRONONCEES PAR LA JURIDICTION PENALE |
EFFETS |
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Décision de condamnation du parent
(article 378 du code civil) Lorsque la juridiction pénale a condamné le parent en qualité : – soit d’auteur, coauteur ou complice d’un crime ou d’une agression sexuelle incestueuse commise sur son enfant ou d’un crime commis sur l’autre parent, elle a l’obligation d’ordonner le retrait total de l’autorité parentale. A défaut de retrait total de l’autorité parentale, la juridiction pénale doit ordonner le retrait partiel de l’autorité parentale ou de son exercice. Dans tous les cas, la juridiction pénale peut, par décision spécialement motivée, ne pas prononcer de tels retraits ; – soit d’auteur, coauteur ou complice d’un délit commis sur l’enfant, autre qu’une agression sexuelle incestueuse, elle a l’obligation de se prononcer sur le retrait total ou partiel de l’autorité parentale ou de son exercice ; – soit d’auteur, coauteur ou complice d’un délit commis sur l’autre parent, ou comme coauteur ou complice d’un crime ou d’un délit commis par son enfant, elle a la faculté d’ordonner le retrait total ou partiel de l’autorité parentale ou de son exercice.
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Sur la titularité de l’autorité parentale | Sur l’exercice de l’autorité parentale |
Le retrait total de l’autorité parentale porte de plein droit sur tous les attributs, tant patrimoniaux que personnels, rattachés à l’autorité parentale : perte du droit d’être informé des choix importants relatifs à la vie de l’enfant, de surveiller son éducation, de l’administration légale, des prérogatives fondamentales de l’autorité parentale (consentement au mariage, à l’adoption, à l’émancipation).Sauf décision contraire, le retrait total s’étend à tous les enfants mineurs déjà nés au moment du jugement.
Le retrait partiel de l’autorité parentale se limite aux attributs de l’autorité parentale spécifiés par le tribunal. Le retrait de l’autorité parentale peut n’avoir d’effet qu’à l’égard de certains des enfants déjà nés. |
L’autre parent qui exerce l’autorité parentale a seul le devoir de protéger l’enfant dans sa sécurité, sa moralité et sa santé, de fixer sa résidence, et de conduire son éducation.
Le parent privé de l’exercice de l’autorité parentale conserve toutefois : – le droit d’entretenir des relations personnelles avec l’enfant (droit de visite et d’hébergement). Ce droit ne peut être refusé que pour des « motifs graves » (article 373-2-1, alinéa 2 du code civil) ; – un droit de surveillance qui oblige l’autre parent à le tenir informé de tous les choix importants relatifs à la vie de l’enfant afin de lui permettre de contrôler la conformité de ces choix à l’intérêt de l’enfant, et de les contester le cas échéant (article 373-2-1, al. 4 du code civil) ; – les prérogatives fondamentales attachées à la titularité de l’autorité parentale (droit de consentir au mariage, à l’émancipation et à l’adoption) ; – l’obligation d’entretien (article 371-2 du code civil).
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Décision de poursuite par le ministère public ou de mise en examen par le juge d’instruction
(article 378-2 du code civil) – soit pour un crime commis sur l’autre parent ; – soit pour un crime ou pour une agression sexuelle incestueuse commis sur son enfant. L’exercice de l’autorité parentale et les droits de visite et d’hébergement du parent poursuivi sont automatiquement suspendus. Cette suspension court jusqu’à la décision du juge aux affaires familiales, le cas échéant saisi par le parent poursuivi, jusqu’à la décision de non-lieu du juge d’instruction ou jusqu’à la décision de la juridiction pénale. |
L’autre parent qui exerce l’autorité parentale a seul le devoir de protéger l’enfant dans sa sécurité, sa moralité et sa santé, de fixer sa résidence, et de conduire son éducation.
Le parent privé de l’exercice de l’autorité parentale et des droits de visite et d’hébergement conserve toutefois : – un droit de surveillance qui oblige l’autre parent à le tenir informé de tous les choix importants relatifs à la vie de l’enfant afin de lui permettre de contrôler la conformité de ces choix à l’intérêt de l’enfant, et de les contester le cas échéant (article 373-2-1, al. 4 du code civil) ; – les prérogatives fondamentales attachées à la titularité de l’autorité parentale (droit de consentir au mariage, à l’émancipation et à l’adoption) ; – l’obligation d’entretien (article 371-2 du code civil).
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