Sélection de la semaine : aliments, autorité parentale, divorce, libéralités, majeurs protégés, mineurs/DIP et succession
Plusieurs décisions pour cette fin semaine en droit de la famille :
- aliments
- autorité parentale
- divorce
- libéralités
- majeurs protégés
- mineurs/DIP
- succession
- Aliments
Contribution à l’entretien et à l’éducation d’une enfant majeure : le juge doit veiller à ne pas dénaturer les termes clairs et précis des conclusions de la mère qui faisait valoir que sa fille était toujours étudiante et à charge (Civ. 1re civ. , 12 juin 2024, n° 22-15.679, 332 F-D) – Viole son obligation de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis une cour d’appel qui, pour décharger le père de toute contribution à l’entretien et l’éducation de son enfant à compter du 1er août 2015, et cela, de manière définitive, retient que celle-ci est majeure depuis plusieurs années et qu’il n’est nullement conclu par la mère de ce chef, alors que, dans ses conclusions d’appel, la mère faisait valoir que, même devenue majeure, sa fille était toujours étudiante et demeurait à sa charge, tous les frais ne pouvant être couverts par la bourse dont elle était bénéficiaire, alors que, ce faisant, elle dénature les termes clairs et précis.
- Autorité parentale
Le juge doit déterminer la durée des rencontres et ne peut déléguer aux responsables du lieu d’accueil le pouvoir d’en modifier les modalités (Civ. 1re, 12 juin 2024, n° 22-15.694, 326 F-D) – Selon l’article 1180-5 du code de procédure civile, lorsque le juge décide qu’un droit de visite s’exercera dans un espace de rencontre, il fixe la durée de la mesure et détermine la périodicité et la durée des rencontres.
Viole cet article en méconnaissant l’étendue de ses pouvoirs dès lors qu’elle n’a pas déterminé la durée des rencontres et a délégué aux responsables du lieu d’accueil le pouvoir d’en modifier les modalités la cour d’appel qui, après avoir jugé que l’autorité parentale s’exercerait en commun et que la résidence de l’enfant serait fixée chez la mère et estimé que la demande du père aux fins d’exercice d’un droit de visite dans un lieu neutre est dans l’intérêt de l’enfant, décide que les rencontres auront lieu une fois par mois, aux dates et selon le calendrier arrêté d’un commun accord entre les deux parents et les responsables du lieu d’accueil, et qu’à l’initiative des responsables du lieu d’accueil, motivée par l’intérêt de l’enfant, les relations pourront se dérouler à l’extérieur de ses locaux et selon des modalités plus larges que celles initialement fixées.
- Divorce
Détermination de l’époux redevable de la plus-value réalisée à l’occasion de la cession d’un immeuble indivis : la répartition ne se fait pas à proportion des droits indivis des parties mais en application des règles relatives à l’impôt sur le revenu (Civ. 1re, 12 juin 2024, n° 22-17.820, 340 F-D) – Selon l’article 150 U, I, alinéa 1er, du code général des impôts, sont passibles de l’impôt sur le revenu, dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH du code général des impôts, les plus-values réalisées par les personnes physiques lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sauf si le bien cédé constitue la résidence principale du cédant au jour de la cession.
Il résulte de l’article 1536, alinéa 2, du code civil que l’impôt sur le revenu constituant une dette personnelle, chacun des époux séparés de biens en reste seul tenu pour le montant lui incombant à titre individuel, au regard des conditions d’imposition et, le cas échéant, d’exonération s’appliquant à lui.
Viole ces textes la cour d’appel qui, pour rejeter la demande de l’épouse tendant à dire que l’impôt appliqué à la plus-value réalisée lors de la vente de l’immeuble indivis (à hauteur de la moitié pour chacun des époux) sera supporté par l’époux seul et dire que chacune des parties a vocation à recevoir la moitié du prix de vente de ce bien consigné chez le notaire, retient que la répartition de cette imposition doit se faire à proportion des droits indivis des parties.
En l’occurrence, dès lors que l’épouse était exonérée des plus-values réalisées à l’occasion de la cession de sa résidence principale, l’époux était seul débiteur de la somme réglée à l’administration fiscale.
- Libéralités
L’intention libérale des disposants ne peut se déduire de leur seul appauvrissement au profit de l’un de leurs enfants (Civ. 1re, 12 uin 2024, n° 22-19.569, 325 F-D) – Ne donne pas de de base légale à sa décision au regard de l’article 843 alinéa 1, du code civil en déduisant l’existence de l’intention libérale des disposants de leur seul appauvrissement au profit d’un de leur enfant la cour d’appel qui, pour dire que ce dernier doit rapporter aux successions de ses parents et de la communauté la somme de 182 939,64 € au titre de l’occupation d’un lot au sein d’un immeuble pour une période donnée, retient qu’en mettant à sa disposition l’appartement dont il avait l’usufruit en échange d’un loyer inférieur au prix du marché, le père, puis l’indivision successorale après lui, s’est appauvri et a agi avec une intention libérale, ce qui constitue une donation indirecte, rapportable par son bénéficiaire à la succession.
- Majeur protégés
Contestation de l’authenticité de la signature du majeur sous curatelle renforcée et de la validité du contrat d’assurance sur la vie : la vérification de l’authenticité de la signature devait précéder l’examen de la validité du contrat (Civ. 1re, 12 juin 2024, n° 22-10.874, 330 F-D) – Aux termes de l’article 465, alinéa 1er, 4°, du code civil si le tuteur ou le curateur a accompli seul un acte qui aurait dû être fait par la personne protégée soit seule, soit avec son assistance ou qui ne pourrait être accompli qu’avec l’autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué, l’acte est nul de plein droit sans qu’il soit nécessaire de justifier d’un préjudice.
Viole ce texte, une cour d’appel qui, pour dire valable le contrat d’assurance sur la vie souscrit auprès de la CNP par le majeur placé en curatelle renforcée et rejeter les demandes en annulation de ce contrat et en condamnation in solidum du fils curateur et de la CNP à restituer à la succession les sommes versées en exécution de ce dernier, retient que la signature du curateur a été apposée à côté d’une signature qui, à ce stade, est attribuée à la personne protégée et qu’il sera répondu postérieurement à la contestation de son authenticité, alors qu’il lui appartenait, avant de statuer sur sa validité, de procéder à la vérification de l’authenticité des signatures et écritures qui étaient attribuées à la personne protégée.
- Mineurs
Déplacement illicite : notion de “demande de retour” (CJUE, 20 juin 2024, n° C-35/23) – L’article 10, sous b), i), du R “Bruxelles II bis” doit être interprété en ce sens que :
- cette disposition ne cesse pas d’être applicable au seul motif qu’une autorité centrale d’un pays tiers a été sollicitée afin de mettre en œuvre une procédure de retour d’un enfant au titre de la convention sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, conclue à La Haye le 25 octobre 1980, et que cette procédure a échoué ;
- ne relèvent pas de la notion de « demande de retour », au sens de cette disposition, ni une demande tendant au retour de l’enfant dans un État autre que l’État membre dans lequel cet enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son déplacement ou son non-retour illicites ni une demande de garde dudit enfant introduite devant les juridictions de cet État membre.
L’article 11, paragraphes 6 à 8, du même Règlement doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas lors de la mise en œuvre d’une procédure de retour d’un enfant, en vertu de la convention sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, conclue à La Haye le 25 octobre 1980, entre un pays tiers et un État membre sur le territoire duquel se trouve cet enfant à la suite d’un déplacement ou d’un non-retour illicites.
- Succession
C’est à l’héritier poursuivi par un créancier de rapporter la preuve d’une division de la dette entre les héritiers au prorata de leurs droits respectifs (Civ. 1re, 12 juin 2024, n° 22-16.817, 337 F-D) – Il résulte de l’article 724 du code civil que l’héritier désigné par la loi, saisi de plein droit des biens, droits et actions du défunt, peut être poursuivi par les créanciers de la succession, sauf à lui à renoncer à celle-ci ou à démontrer qu’il est primé par des héritiers plus proches ou qu’il est exclu par un légataire universel ou encore, que la dette doit être divisée entre les héritiers au prorata de leurs droits respectifs.
Selon l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
Viole ces textes une cour d’appel qui a inversé la charge de la preuve en retenant, pour annuler la contrainte adressée à l’héritier pour la totalité des cotisations réclamées, qu’il appartenait à l’URSSAF, informée par l’intéressé dès la notification de la mise en demeure, de l’existence de plusieurs héritiers, de vérifier leur identité exacte auprès du notaire en charge de la succession et de diviser les poursuites en justice à l’encontre de chacun d’eux pour leur part et en déduit qu’elle ne peut valider la contrainte prise à l’encontre d’un seul des héritiers de la débitrice.
La condamnation de l’indivisaire à payer des dommages-intérêts à l’adjudicataire du bien indivis suppose de caractériser un abus du droit à agir : ce qui n’est pas le cas s’il ne fait que se défendre à une action de ses coïvdivisaires (Civ. 1re, 12 juin 2024, n° 21-23.782, 328 F-D) – Ne donne pas de base légale à sa décision au regard de l’article 1240 du code civil une cour d’appel qui, pour condamner un coïndivisaire à payer des dommages-intérêts pour procédure abusive, retient que son action en justice tend à remettre en cause une vente judiciairement autorisée dans l’intérêt de l’indivision successorale, que ses prétentions sont manifestement dénuées de fondement et reposent sur des allégations et des avis de valeur sans pertinence, et que sa demande d’insertion d’une clause d’attribution dans le cahier des charges de la vente démontre qu’il poursuit en réalité l’objectif de se voir attribuer le bien à bas prix, tout en ralentissant les opérations successorales, sans caractériser les circonstances particulières rendant fautive l’assignation en intervention forcée dans l’instance d’appel des adjudicataires, alors qu’il était appelant d’un jugement autorisant la vente du bien indivis à la demande de certains de ses coindivisaires et soulevait l’irrecevabilité de cette demande en invoquant les testaments des défunts, et qu’il incombait aux juges du fond de fixer le prix auquel la clause aurait pu lui permettre d’obtenir l’attribution du bien.
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