Avis du Conseil d’État sur le projet de loi de programmation pour la justice 2018-2022
Le 12 avril 2018, le Conseil d’État a rendu son avis sur le projet de loi de programmation pour la justice 2018-2022 qui devrait être présenté en Conseil des ministres demain. En voici quelques extraits.
Établissement d’actes de notoriété par les notaires
« 20. La volonté d’alléger les tâches des juridictions se traduit par le transfert aux notaires de l’établissement d’actes de notoriété, soit pour constater la possession d’état permettant d’établir un lien de filiation, soit pour suppléer des actes de l’état civil détruits ou disparus. Quoiqu’ayant des incidences directes ou indirectes sur l’état civil, voire la nationalité, ce transfert ne peut être regardé comme la délégation d’une mission de souveraineté, étant rappelé qu’il s’intègre dans une mission déjà remplie par ces officiers publics et ministériels. La disposition n’appelle pas d’observation de la part du Conseil d’État. »
Recueil du consentement en matière de procréation médicalement assistée
« 21. En revanche, le Conseil d’État propose d’écarter du texte présenté les dispositions prévoyant de confier exclusivement à ces mêmes officiers publics et ministériels le recueil du consentement en matière de procréation médicalement assistée, actuellement effectué, soit par le juge, soit par un notaire, au choix des personnes concernées. En effet, la perspective prochaine d’une réforme de la loi sur la bioéthique rend prématuré un choix que les travaux préparatoires à cette réforme et les débats parlementaires pourraient contredire ou aménager : la disposition envisagée trouverait donc mieux sa place dans ce futur véhicule législatif, qui devrait aborder de manière plus générale la question des modes de recueil du consentement obligatoire des personnes en cause. »
Expérimentation de nouveaux modes de révision des pensions alimentaires
« 22. Le projet prévoit une habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance, à titre expérimental, dans les conditions qu’il précise, les mesures nécessaires pour permettre la délivrance des titres exécutoires afférents à la modification des contributions à l’entretien et à l’éducation des enfants, autrement que par l’obtention d’une décision juridictionnelle du juge aux affaires familiales. Sa rédaction apparaît propre à favoriser l’appréciation du dispositif envisagé au regard des objectifs qu’il recherche. À cet égard, il est de nature à décharger les juges aux affaires familiales et à accélérer la mise à exécution des décisions de modification de ces contributions.
23. Le Conseil d’État considère que la rédaction initiale du projet prévoyant de confier la délivrance de ces titres exécutoires à toute autorité ou organisme soumis au contrôle de l’Etat était excessivement vague. Il propose, conformément aux intentions du Gouvernement, de désigner expressément les caisses d’allocations familiales. Il apporte cette précision, en ajoutant que l’ordonnance devra prévoir les garanties de compétence et d’impartialité que devront présenter les personnels affectés à cette activité. Il conserve par ailleurs la possibilité de confier la délivrance de ces titres exécutoires aux officiers publics et ministériels. Il estime que les conditions dans lesquelles est circonscrite la délivrance de ces titres exécutoires et l’application d’un barème national pour décider la modification d’une contribution préviennent le risque de solutions disparates dans des situations complexes. Le Conseil d’État relève que le recours possible devant le juge aux affaires familiales est de nature à protéger les droits et intérêts des parties. Il ajoute, cependant, au projet que la production des documents nécessaires à la délivrance des titres exécutoires doit s’effectuer dans le respect du principe de la contradiction.
Régimes matrimoniaux – Alléger le contrôle a priori du juge des tutelles pour les actes de gestion patrimoniale
« Ces dispositions n’appellent pas d’observation de la part du Conseil d’État. »
Majeurs protégés – Contrôle des comptes de gestion
« 33. Les dispositions techniques prévues en la matière, auxquelles le Conseil d’État apporte quelques améliorations rédactionnelles, n’appellent pas d’observation particulière. Le Conseil d’État souligne l’intérêt de celles qui, dans l’esprit de la récente introduction du divorce par consentement mutuel par acte d’avocat déposé au rang des minutes d’un notaire, assurent une souplesse au stade de l’introduction et du déroulement des autres types de divorce et favorisent une rupture pacifiée du lien conjugal. De même, eu égard aux objectifs poursuivis, il relève l’opportunité d’alléger le contrôle et d’organiser la surveillance interne du déroulement de la tutelle par les personnes chargées de la mesure, tout en réservant 1’intervention du juge en cas de désaccord. »
Améliorer l’efficacité en permettant l’exécution forcée par le parquet des décisions du juge des affaires familiales
« 34. Le Conseil d’Etat précise que la faculté donnée au procureur de la République de requérir directement le concours de la force publique pour faire assurer l’exercice de l’autorité parentale doit être mise en œuvre à la demande de la personne concernée ou du juge aux affaires familiales, étant souligné que doit d’abord être privilégiée toute voie, telle la médiation familiale, favorisant le rapprochement des parties et l’intérêt des enfants. »
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