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Sélection jurisprudentielle : assistance éducative, autorité parentale, divorce, famille, filiation, libéralités, majeurs protégés, mineurs et successions

08/08/2022

Jurisprudence3L’activité jurisprudentielle du mois de juillet a finalement été assez riche :

  • assistance éducative
  • autorité parentale
  • divorce
  • famille
  • filiation
  • libéralités
  • majeurs protégés
  • mineurs
  • successions

Le mois d’août sera, à n’en pas douter, beaucoup plus calme !

  • ASSISTANCE ÉDUCATIVE

La contradiction du mineur sur un élément essentiel de sa vie ne suffit pas à retirer à l’acte de naissance sa force probante (Civ. 1re, 6 juill. 2022, n° 22-12.506, 671 FS-B) – Aux termes de l’article 47 du code civil, tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française.

Prive sa décision de base légale au regard de ce texte la cour d’appel qui, pour refuser le bénéfice de l’assistance éducative de l’intéressé, s’est déterminée par des motifs impropres à établir que les faits déclarés à l’acte de naissance ne correspondaient pas à la réalité en retenant que celui-ci indique que l’extrait d’acte de naissance qu’il produit lui aurait été transmis par sa mère, alors qu’il avait fait état, lors de son évaluation sociale, du décès de celle-ci, et que ces contradictions sur un élément essentiel de sa vie rendent douteuses les conditions dans lesquelles l’acte a été obtenu, ce qui suffit à retirer à celui-ci toute force probante. 

 

  • AUTORITÉ PARENTALE

Une juridiction d’un État membre ne demeure pas compétente pour statuer en matière de garde d’enfant sur la base du Règlement « Bruxelles II bis » lorsque la résidence habituelle de l’enfant a légalement fait l’objet d’un transfert, en cours de procédure, sur le territoire d’un État tiers qui est partie à la convention de La Haye de 1996 (CJUE, 14 juill. 2022, n° C‑572/21) – L’article 8, § 1, du Règlement (CE) n° 2201/2003, du 27 novembre 2003 (dit « Bruxelles II bis »), lu en combinaison avec l’article 61, sous a), de ce Règlement, doit être interprété en ce sens qu’une juridiction d’un État membre, saisie d’un litige en matière de responsabilité parentale, ne conserve pas la compétence pour statuer sur ce litige au titre de cet article 8, § 1, lorsque la résidence habituelle de l’enfant en cause a été transférée légalement, en cours d’instance, sur le territoire d’un État tiers qui est partie à la convention concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l’exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants, conclue à La Haye le 19 octobre 1996.

NB – v. le communiqué de presse en cliquant ici.

 

  • DIVORCE

Divorce et liquidation : responsabilité de l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation  (Civ. 1re, 6 juill. 2022, n° 21-50.013, 588 F D) – Dès lors que, d’une part, un cumul de l’action en recel de communauté et de celle en rescision pour lésion est possible, d’autre part, que la cour d’appel, ayant relevé que l’action en recel n’avait que de faibles chances d’aboutir, n’avait pas écarté une éventualité favorable et ne pouvait refuser d’indemniser ce préjudice, la SCP d’avocats a commis une faute en ne présentant pas un moyen critiquant ces motifs et en privant l’ex-épouse de la chance d’obtenir la cassation de l’arrêt ayant rejeté sa demande au titre du recel de communauté. La chance ainsi perdue sera évaluée à 70 % et celle d’obtenir gain de cause devant une juridiction de renvoi, qualifiée de faible par la cour d’appel, au regard de la difficulté d’établir la volonté de l’ex-époux de frustrer l’ex-épouse de 600 000 F, soit 91 470 €, sera fixée à 10 % de sorte que le préjudice qui en résulte pour celle-ci s’élève à la somme de 3 201,22 €.

Prestation compensatoire : deux décisions viennent préciser la prise en compte ou non de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant dans l’appréciation des ressources du débiteur ou du créancier (Civ. 1re, 13 juill. 2022, n°  21-12.354, 595 F-D ; 13 juill. 2022, n° 21-12.460, 596 F-D) – Dans une première décision (21-12.354), la Cour de cassation affirme que les charges liées à l’entretien et à l’éducation des enfants et exposées par l’époux débiteur doivent venir en déduction des ressources de celui-ci : 

Viole les articles 270 et 271 du code civil une cour d’appel qui, pour fixer à 50 000 € la somme due par l’ex-époux à l’ex-épouse au titre de la prestation compensatoire, retient que la charge que constitue pour le premier l’entretien et l’éducation des deux enfants nés de son union avec sa nouvelle compagne ne peut être opposée à la première, s’agissant d’un libre choix de sa part, dont il ne peut être tiré aucune conséquence quant aux obligations alimentaires découlant d’une précédente union, alors que, pour la fixation de la prestation compensatoire, les charges liées à l’entretien et à l’éducation des enfants et exposées par l’époux débiteur doivent venir en déduction des ressources de celui-ci.

Dans une seconde décision (21-12.460), elle relève, au contraire, que les juges du fond ne sont pas tenus de déduire des ressources du prétendu créancier qui n’en a pas fait la demande la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants qu’ils mettaient à sa charge : 

Après avoir analysé la situation patrimoniale des époux et son évolution dans un avenir prévisible, la cour d’appel, qui, en l’absence de demande de l’époux prétendument créancier, n’était pas tenue de déduire des ressources de celui-ci la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants qu’elle mettait à sa charge, a retenu une absence de disparité créée par le divorce dans les situations respectives des époux et a ainsi légalement justifié sa décision de rejeter la demande de prestation compensatoire formée par lui.

Liquidation du régime matrimonial et office du juge (Civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 21-11.329, 605 F-D) – Il résulte de  l’article 4 du code civil que le juge, auquel il incombe de trancher lui-même les contestations soulevées par les parties, ne peut se dessaisir et déléguer ses pouvoirs à un notaire liquidateur.

Méconnaît son office et viole ce texte la cour d’appel qui, après avoir qualifié le véhicule litigieux de bien de communauté devant être intégré à l’actif commun, retient qu’il appartiendra à l’ex-époux, qui a récupéré ledit véhicule en 2006, de justifier de sa valeur actualisée auprès du notaire liquidateur.

 

Précisions quant à la compétence judiciaire en matière de divorce, de responsabilité parentale et d’obligations alimentaire (CJUE, 1er août 2022, ° C‑501/20) – 1) L’article 3, § 1, sous a), du Règlement (CE) n° 2201/2003 du 27 novembre 2003, dit « Bruxelles II bis », et l’article 3, sous a) et b), du Règlement (CE) n° 4/2009 du 18 décembre 2008, dit « Obligations alimentaires », doivent être interprétés en ce sens que, aux fins de la détermination de la résidence habituelle, au sens de ces dispositions, n’est pas susceptible de constituer un élément déterminant la qualité d’agents contractuels de l’Union européenne des époux concernés, affectés dans une délégation de cette dernière auprès d’un État tiers et dont il est allégué qu’ils jouissent du statut diplomatique dans cet État tiers.

2) L’article 8, § 1, du Règlement n° 2201/2003 doit être interprété en ce sens que, aux fins de la détermination de la résidence habituelle d’un enfant, le lien constitué par la nationalité de la mère ainsi que par la résidence de celle-ci, avant la célébration du mariage, dans l’État membre dont relève la juridiction saisie d’une demande en matière de responsabilité parentale n’est pas pertinent, tandis qu’est insuffisante la circonstance selon laquelle les enfants mineurs sont nés dans cet État membre et en possèdent la nationalité.

3) Dans le cas où aucune juridiction d’un État membre n’est compétente pour statuer sur une demande de dissolution du lien matrimonial en vertu des articles 3 à 5 du Règlement n° 2201/2003, l’article 7 de ce Règlement, lu conjointement avec l’article 6 de celui-ci, doit être interprété en ce sens que, le fait que le défendeur au principal soit ressortissant d’un État membre autre que celui dont relève la juridiction saisie empêche l’application de la clause relative à la compétence résiduelle prévue à cet article 7 pour fonder la compétence de cette juridiction, sans toutefois faire obstacle à ce que les juridictions de l’État membre dont il est ressortissant soient compétentes pour connaître d’une telle demande en application des règles nationales de compétence de ce dernier État membre.

Dans le cas où aucune juridiction d’un État membre n’est compétente pour statuer sur une demande en matière de responsabilité parentale en vertu des articles 8 à 13 du Règlement n° 2201/2003, l’article 14 de ce Règlement doit être interprété en ce sens que, le fait que le défendeur au principal soit ressortissant d’un État membre autre que celui dont relève la juridiction saisie ne fait pas obstacle à l’application de la clause relative à la compétence résiduelle prévue à cet article 14.

 4) L’article 7 du Règlement n° 4/2009 doit être interprété en ce sens que :

  • dans le cas où la résidence habituelle de l’ensemble des parties au litige en matière d’obligations alimentaires ne se trouve pas dans un État membre, la compétence fondée, dans des cas exceptionnels, sur le forum necessitatis, visé à cet article 7, peut être constatée si aucune juridiction d’un État membre n’est compétente en vertu des articles 3 à 6 de ce règlement, si la procédure ne peut raisonnablement être introduite ou conduite dans l’État tiers avec lequel le litige a un lien étroit, ou s’y révèle impossible, et si ce litige présente un lien suffisant avec l’État membre de la juridiction saisie ;
  • pour considérer, dans des cas exceptionnels, qu’une procédure ne peut raisonnablement être introduite ou conduite dans un État tiers, il importe que, au terme d’une analyse circonstanciée des éléments avancés dans chaque cas d’espèce, l’accès à la justice dans cet État tiers soit, en droit ou en fait, entravé, notamment par l’application de conditions procédurales discriminatoires ou contraires aux garanties fondamentales du procès équitable, sans qu’il soit exigé que la partie qui se prévaut dudit article 7 soit tenue de démontrer avoir vainement introduit, ou tenté d’introduire, cette procédure devant les juridictions du même État tiers, et
  • pour considérer qu’un litige doit présenter un lien suffisant avec l’État membre de la juridiction saisie, il est possible de se fonder sur la nationalité de l’une des parties.

NB – V. le communiqué de presse en cliquant ici.

  • FAMILLE

Regroupement familial : le refus de délivrance d’un visa national aux fins du regroupement familial au parent d’un mineur réfugié non accompagné devenu majeur au cours de cette procédure est contraire au droit de l’Union (CJUE, 1er août 2022, C-273/20 et C-355/20 ([Regroupement familial avec un mineur réfugié] et CJUE, 1er août 2022, n°  C-279/20 [Regroupement familial d’un enfant devenu majeur]) –  Dans la première affaire (C-273/20 et C-355/20 ), la CJUE juge que :

L’article 16, § l, sous a), de la directive 2003/86/CE du 22 septembre 2003, relative au droit au regroupement familial, doit être interprété en ce sens que, en cas de regroupement familial de parents avec un réfugié mineur non accompagné, en vertu de l’article 10, § 3, sous a), de cette directive, lu en combinaison avec l’article 2, sous f), de celle-ci, le fait que ce réfugié soit encore mineur à la date de la décision relative à la demande d’entrée et de séjour aux fins du regroupement familial introduite par les parents du regroupant ne constitue pas une « condition », au sens de cet article 16, § 1, sous a), dont le non-respect permet aux États membres de rejeter une telle demande. En outre, ces dispositions, lues à la lumière de l’article 13, § 2, de ladite directive, doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à une réglementation nationale en vertu de laquelle, dans un tel cas de figure, le droit de séjour des parents concernés prend fin dès que l’enfant atteint la majorité.

L’article 16, § 1, sous b), de la directive 2003/86 doit être interprété en ce sens que, pour considérer qu’il existe une vie familiale effective, au sens de cette disposition, dans le cas du regroupement familial d’un parent avec un enfant mineur ayant obtenu le statut de réfugié, lorsque cet enfant est devenu majeur avant l’adoption de la décision relative à la demande d’entrée et de séjour aux fins du regroupement familial introduite par ce parent, la seule ascendance directe au premier degré n’est pas suffisante. Cependant, il n’est pas nécessaire que l’enfant regroupant et le parent concerné cohabitent au sein du même foyer ou vivent sous le même toit pour que ce parent puisse bénéficier du regroupement familial. Des visites occasionnelles, pour autant qu’elles soient possibles, et des contacts réguliers de quelque nature que ce soit peuvent suffire pour considérer que ces personnes reconstruisent des relations personnelles et affectives et pour attester l’existence d’une vie familiale effective. En outre, il ne saurait non plus être exigé que l’enfant regroupant et le parent concerné se prêtent un soutien financier mutuel.

Dans la seconde affaire (C-279/20), elle juge que : 

L’article 4, §1, premier alinéa, sous c), de la directive 2003/86/CE du 22 septembre 2003, relative au droit au regroupement familial, doit être interprété en ce sens que la date à laquelle il convient de se référer pour déterminer si l’enfant d’un regroupant ayant obtenu le statut de réfugié est un enfant mineur, au sens de cette disposition, dans une situation où cet enfant est devenu majeur avant l’octroi du statut de réfugié au parent regroupant et avant l’introduction de la demande de regroupement familial, est celle à laquelle le parent regroupant a présenté sa demande d’asile en vue d’obtenir le statut de réfugié, à condition qu’une demande de regroupement familial ait été introduite dans les trois mois suivant la reconnaissance du statut de réfugié au parent regroupant.

L’article 16, § 1, sous b), de la directive 2003/86 doit être interprété en ce sens que, pour considérer qu’il existe une vie familiale effective, au sens de cette disposition, dans le cas du regroupement familial d’un enfant mineur avec un parent ayant obtenu le statut de réfugié, lorsque cet enfant est devenu majeur avant l’octroi du statut de réfugié au parent regroupant et avant l’introduction de la demande de regroupement familial, la seule relation juridique de filiation n’est pas suffisante. Cependant, il n’est pas nécessaire que le parent regroupant et l’enfant concerné cohabitent au sein du même foyer ou vivent sous le même toit pour que cet enfant puisse bénéficier du regroupement familial. Des visites occasionnelles, pour autant qu’elles soient possibles, et des contacts réguliers de quelque nature que ce soit peuvent suffire pour considérer que ces personnes reconstruisent des relations personnelles et affectives et pour attester l’existence d’une vie familiale effective. En outre, il ne saurait non plus être exigé que le parent regroupant et son enfant se prêtent un soutien financier mutuel.

NB – V. le communiqué de presse en cliquant ici.

  • FILIATION

Reconnaissance frauduleuse de paternité (Civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 21-13.190, 597 F D) – Voici un cas dans lequel la reconnaissance de paternité a été jugée frauduleuse et donc annulée : une cour d’appel a constaté qu’à l’époque de la reconnaissance (le 6 août 2012), déclarée en région lyonnaise, la mère, de nationalité guinéenne, en situation irrégulière, était domiciliée avec ses deux autres enfants dans une ville située en dehors de cette région, et qu’elle avait, le 12 octobre 2012, présenté un dossier au service des nationalités de cette ville, après avoir quitté la région lyonnaise où se trouvait pourtant le père prétendu. Elle a relevé, outre la différence d’âge entre les parents, les informations contradictoires données par ceux-ci sur les circonstances de leur rencontre en Belgique, le début de leur liaison et la date d’entrée en France de la mère, ainsi que sur leurs relations à partir de la grossesse. Elle a constaté encore que, dans la notice indicative de la composition de sa famille, le prétendu père ne mentionnait pas l’enfant, dont il ignorait la date de naissance, et qu’il avait, à plusieurs reprises, tenté de se soustraire aux convocations des enquêteurs et ne s’était pas présenté lors des opérations d’expertise biologique judiciairement ordonnée.

  • LIBÉRALITÉS

Interdiction de recevoir des libéralités pour les membres des professions de santé : l’atteinte au droit de propriété du malade n’est pas disproportionnée (Cons. const., 29 juill. 2022, n° 2022-1005 QPC) – Le premier alinéa de l’article 909 du code civil, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs, est conforme à la Constitution. Aux termes de ce texte,  « les membres des professions médicales et de la pharmacie, ainsi que les auxiliaires médicaux qui ont prodigué des soins à une personne pendant la maladie dont elle meurt ne peuvent profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires qu’elle aurait faites en leur faveur pendant le cours de celle-ci ».

NB – Dans sa décision du 12 mars 2021 (n° 2020-888 QPC , AJ fam. 2021. 230, obs. D. Pollet et J. Casey), le Conseil constitutionnel avait au contraire déclaré inconstitutionnelle l’incapacité de recevoir prévue à l’article L. 116-4 du Code de l’action sociale et des familles (CASF) au profit des personnes rendant des services à domicile, en ce que sa formulation était trop générale. Ce qui n’est pas le cas de l’interdiction prévue à l’article 909 “qui ne vaut que pour les libéralités consenties pendant le cours de la maladie dont le donateur ou le testateur est décédé” et “qui ne s’applique qu’aux seuls membres des professions médicales, de la pharmacie et aux auxiliaires médicaux énumérés par le code de la santé publique, à la condition qu’ils aient dispensé des soins en lien avec la maladie dont est décédé le patient”.

Réduction des libéralités (Civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 21-10.226, 606 F-D) – Selon l’article 924 du code civil, lorsque la libéralité excède la quotité disponible, le gratifié, successible ou non successible, doit indemniser les héritiers réservataires à concurrence de la portion excessive de la libéralité, quel que soit cet excédent.

Viole ce texte la cour d’appel qui, pour rejeter la demande du fils du défunt d’un premier lit en réduction du legs universel dont l’épouse survivante était bénéficiaire, retient,  tout en constatant que celle-ci contestait avoir renoncé à son legs universel qu’elle a opté pour l’une des quotités disponibles de l’article 1094-1 du code civil et a ainsi d’elle-même opéré la réduction des libéralités reçues à l’une des quotités permises par la loi.

  • MAJEURS PROTÉGÉS

Le mandat de protection future ne garantit pas que la personne prévue soit effectivement désignée comme curateur ou tuteur (Civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 20-20.863, 600 F D) – Après avoir constaté qu’en dépit d’un mandat de protection future établi le 29 octobre 2014 entre la majeur vulnérable et sa fille, les mesures de curatelle successives avaient été confiées à un mandataire judiciaire en raison de la mésentente et de la suspicion existante entre membres de la fratrie, une cour d’appel a relevé, tant par motifs propres qu’adoptés, que le conflit grave, portant tant sur la gestion du patrimoine que sur les soins à prodiguer à la mère, continuait d’opposer ses enfants, que les multiples changements d’hébergement de la majeure protégée, dont quatre en 2018 et 2019, intervenus notamment à l’initiative de sa fille lui avaient été dommageables du fait de sa pathologie et qu’elle bénéficiait désormais d’un lieu d’hébergement stable auprès de sa soeur.

Pour la Cour de cassation, ayant pris en considération la volonté initialement exprimée par la majeure, elle en a souverainement déduit que l’intérêt de la majeure protégée commandait toujours de confier l’exercice de la tutelle à une personne extérieure à la famille et a, ainsi, légalement justifié sa décision.

 

  • MINEURS

Enlèvement international  : le père ne rapportait pas la preuve d’un risque de danger grave ou de création d’une situation intolérable (Civ. 1re, 6 juill. 2022, n° 22-11.435, 667 F D) – Après avoir relevé que le père n’avait déposé plainte pour mauvais traitements et sévices sexuels prétendument commis sur les enfants par leur mère que plusieurs mois après les faits d’enlèvement et postérieurement à la découverte de son lieu de résidence, une cour d’appel a constaté que les allégations de violences physiques étaient fondées sur les seules déclarations du père et qu’à l’occasion de leur audition l’une d’elles n’y avait pas fait allusion, l’autre déclarant seulement avoir été frappée une fois par sa mère.  Elle a retenu que le père ne rapportait pas la preuve, par des éléments objectifs et différents de ses propres allégations, que les enfants seraient dans une situation psychique telle que leur retour auprès de leur mère serait rendu impossible. C’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation de la valeur et la portée des éléments de preuve soumis à son examen que la cour d’appel, qui n’était pas tenue de s’expliquer sur les pièces qu’elle décidait d’écarter et qui a procédé à la recherche prétendument omise, a estimé que le père ne rapportait pas la preuve d’un risque de danger grave ou de création d’une situation intolérable au sens de l’article 13 b) de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980, en cas de retour immédiat des enfants au Maroc. Le moyen n’est donc pas fondé.

 

Pas de conseil de famille si l’intérêt de l’orphelin le justifie (Civ. 1re, 6 juill. 2022, n° 21-25.538, 666 F D) – Une cour d’appel a relevé, par motifs propres et adoptés, que le rapport des services éducatifs mettait en évidence un contexte familial complexe ne permettant pas d’envisager l’accueil de l’enfant au sein de sa famille, dès lors, d’une part, que, si tous les proches contactés indiquaient avoir des liens affectifs avec l’enfant et vouloir prendre des décisions dans son intérêt, ils n’avaient, depuis le décès de sa mère, manifesté par aucun acte l’intention de s’investir auprès d’elle et n’étaient pas en mesure de s’occuper d’elle, d’autre part, qu’il existait des non-dits et des conflits intra-familiaux qui rendaient impossible tout dialogue entre eux.

Elle a retenu, par motifs adoptés, que le placement administratif, sollicité par les proches de l’enfant, n’était pas de l’intérêt de celle-ci qui, après avoir vécu comme des abandons les décès successifs de sa mère biologique et de sa mère adoptive, avait besoin d’un cadre stable et sécurisant jusqu’à sa majorité.

La cour d’appel, qui a pris en considération l’intérêt de la mineure, a pu en déduire qu’il était impossible de constituer un conseil de famille et que, en l’absence de toute personne en mesure de la prendre en charge, la tutelle était vacante. Elle a ainsi légalement justifié sa décision.

 

Protection internationale : les mineurs non accompagnés disposent d’un droit de recours contre le refus de prise en charge par un État membre où réside un proche (CJUE, 1er août 2022, n° C‑19/21, I, S c/Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid) – L’article 27, § 1, du Règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, lu en combinaison avec les articles 7, 24 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doit être interprété en ce sens que :

il impose à l’État membre auquel une requête aux fins de prise en charge, fondée sur l’article 8, § 2, de ce Règlement, a été adressée de conférer un droit de recours juridictionnel contre sa décision de refus au mineur non accompagné, au sens de l’article 2, sous j), dudit Règlement, qui demande la protection internationale, mais non au proche de ce mineur, au sens de l’article 2, sous h), du même Règlement. 

 

Une demande de protection internationale introduite par un mineur ne peut être rejetée comme irrecevable au motif que ses parents se sont déjà vu accorder une telle protection dans un autre État membre (CJUE, 1er août 2022, n° C-720/20, RO c/ Bundesrepublik Deutschland) – 1) L’article 20, § 3, du Règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, doit être interprété en ce sens que :

il n’est pas applicable par analogie à la situation dans laquelle un mineur et ses parents introduisent des demandes de protection internationale dans l’État membre dans lequel ce mineur est né, alors que ses parents bénéficient déjà d’une protection internationale dans un autre État membre.

2) L’article 33, § 2, sous a), de la directive 2013/32/UE du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale, doit être interprété en ce sens que :

il n’est pas applicable par analogie à la demande de protection internationale introduite par un mineur dans un État membre lorsque ce n’est pas ce mineur lui-même, mais ses parents, qui bénéficient d’une protection internationale dans un autre État membre.

 

  • SUCCESSION

Prescription de l’action en restitution consécutive à l’annulation d’un testament (Civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 20-20.738, 609 FS-B) – Il résulte de l’article 2224 du code civil que l’action en restitution consécutive à l’annulation d’un testament se prescrit par cinq ans à compter du jour où l’héritier ou le légataire rétabli dans ses droits a connu ou aurait dû connaître l’appréhension, par le bénéficiaire du testament annulé, des biens revendiqués, sans que le point de départ du délai de prescription puisse être antérieur au prononcé de la nullité

Les intérêts de la dette, sujette à rapport, sont dus de plein droit à compter du jour de l’ouverture de la succession (Civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 21-10.040, 599 F-D) – Selon l’article 829 du code civil (dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006), chaque cohéritier fait rapport à la masse des sommes dont il est débiteur. Selon l’article 856 du même code (dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006), les intérêts des dettes sujettes à rapport sont dus de plein droit à compter du jour de la succession.

Viole ces textes une cour d’appel qui, pour rejeter la demande de l’un des héritiers, retient qu’elle n’est pas justifiée, alors que les intérêts de la dette, qui était sujette à rapport, étaient dus de plein droit à compter du jour de l’ouverture de la succession.

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