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Sélection jurisprudentielle : adoption, aliments, concubinage, divorce, droit pénal de la famille, état civil, mariage et régime matrimonial

24/03/2023

Jurisprudence3Pour cette semaine, j’ai relevé douze décisions :

  • adoption
  • aliments
  • concubinage
  • divorce
  • droit pénal de la famille
  • état civil
  • mariage
  • régime matrimonial

  • Adoption

Application des règles de l’adoption internationale (Texas) à la Polynésie française (Civ. 1re, 15 mars 2023, n° 20-21.370, 191 F-D) – Les règles relatives à l’adoption, en ce que la filiation constitue un élément de l’état des personnes, s’appliquent de plein droit en Polynésie française en application de l’article 7 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française.

Aux termes de l’article 370-5 du code civil, l’adoption régulièrement prononcée à l’étranger produit en France les effets de l’adoption plénière si elle rompt de manière complète et irrévocable le lien de filiation préexistant. A défaut, elle produit les effets de l’adoption simple. Elle peut être convertie en adoption plénière si les consentements requis ont été donnés expressément en connaissance de cause.

La cour d’appel a relevé qu’en vertu de la loi texane, l’adoption prononcée en application de la section 9, articles 46a, de la loi de 1931, 42e législature, emportait cessation et extinction de toutes les relations légales ainsi que de tous les droits et devoirs qui existent entre l’enfant et ses parents biologiques, mais que l’enfant adopté est appelé à hériter tant de ses parents adoptifs que de ses parents biologiques.

Il en résulte que l’adoption au Texas des enfants du défunt nés d’un premier lit par le second époux de sa première femme, n’ayant pas rompu de manière complète leurs liens de filiation avec leur famille d’origine, ne pouvait produire que les effets d’une adoption simple, régie par les articles 363 et suivants du code civil. Ils étaient dès lors bel et bien des héritiers réservataires et légataires universels du défunt.

  • Aliments

Les revenus de l’époux non attrait à l’instance ne peuvent être pris en considération que dans la mesure où ils réduisent les charges de son conjoint débiteur (Civ. 1re, 15 mars 2023, n° 21-24.700,  186 F-D) – Il résulte des articles 205, 206 et 208 du code civil que la dette du débiteur d’aliments est une dette personnelle dont le montant est fixé eu égard à ses seules ressources.

Viole ces textes la cour d’appel qui, pour condamner l’un des obligés alimentaires à payer à l’établissement public de soins une somme de 779,40 € par mois au titre de son obligation alimentaire, retient que, l’épouse de celui-ci étant co-débitrice d’aliments à l’égard de sa belle-mère, ses revenus doivent être pris en compte pour fixer le quantum de l’obligation pesant sur le couple, alors que les revenus de l’épouse de celui-ci, seul attrait à l’instance, ne pouvaient être pris en considération que dans la mesure où ils réduisaient les charges de celui-ci, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

NB  V. déjà Civ. 1re, 25 avr. 2007, n06-12.614, AJ fam. 2007. 269, obs. F. Chénedé. Pour une synthèse des règles qui gouvernent l’obligation alimentaire, v. notre fiche d’orientation en cliquant ICI.

Fixation de la contribution à l’éducation et à l’entretien des enfants : attention à ne pas dénaturer l’écrit ! (Civ. 1re, 15 mars 2023, n° 21-14.497, 188 F-D et  n° 22-11.645, 189 F-D) – Dans deux décisions du même jour la Cour de cassation censure les juges du fond pour avoir dénaturé l’écrit qui leur était soumis : 

  • dans la première affaire,  l’arrêt condamne le père à payer à la mère une somme de 400 € par mois et par enfant au titre de sa contribution à leur entretien et leur éducation, après avoir constaté que, dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 31 août 2020, celle-ci avait demandé la condamnation de celui-là au paiement de la somme de 408 € par mois et par enfant, alors que, dans ses dernières écritures remises au greffe le 31 août 2020, la mère demandait une somme de 250 € par mois et par enfant ;
  •  dans la seconde affaire, pour répartir les frais d’entretien et d’éducation de l’enfant à concurrence des deux tiers à la charge du père et du tiers restant à la charge de la mère, après avoir ordonné la résidence de celui-ci en alternance au domicile de chacun des parents, l’arrêt retient que la répartition des charges entre eux ne fait l’objet d’aucune controverse, alors que, dans ses dernières conclusions, la mère, qui demandait la condamnation du père à lui payer une somme de 800 € par mois au titre de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant, soutenait que les revenus des parents n’étaient pas proratisés à hauteur des deux tiers pour le père et un tiers pour elle-même, qu’en 2019 ses revenus représentaient un septième du revenu global et avaient diminué en 2021, ce qui avait nécessité le déblocage de l’intégralité de son épargne salariale.

NB – À l’heure où l’on dénonce la lenteur de la justice, l’on voit que les juges doivent tout de même prendre le temps de la rédaction pour éviter des recours inutiles…

  • Concubinage

L’allocation de soutien familial cesse en cas de concubinage (Civ. 2e, 16 mars 2023, n° 21-21.637, 280 F-D) – Il résulte de l’article L. 523-1, 3°, du code de la sécurité sociale (dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008) que le droit à l’allocation de soutien familial est ouvert à l’enfant dont au moins un des deux parents se soustrait ou se trouve hors d’état de faire face à son obligation d’entretien ou au versement d’une pension alimentaire mise judiciairement à sa charge.

Aux termes de l’article L. 523-2 du même code (dans sa rédaction issue de la loi n° 99-944 du 15 novembre 1999), lorsque le père ou la mère titulaire du droit à l’allocation de soutien familial se marie, conclut un pacte civil de solidarité ou vit en concubinage, cette prestation cesse d’être due.

Viole ces textes la cour d’appel qui, pour débouter la caisse de ses demandes en répétition de l’indu d’allocation de soutien familial, ayant constaté l’existence d’une relation de concubinage entre l’allocataire et son compagnon depuis janvier 2010, retient essentiellement que l’allocation de soutien familial dépend de la situation de solvabilité du parent des enfants, de sorte que la présence au foyer de la mère d’un concubin sans rapport de filiation avec l’enfant pour lequel l’allocation est versée est indifférente à son droit à percevoir cette allocation. L’allocataire est donc condamné au remboursement de l’indu d’allocation.

  • Divorce

L’indemnité d’occupation due par un indivisaire pour la jouissance privative d’un immeuble indivis doit revenir à l’indivision (Civ. 1re, 15 mars 2023, n° 21-15.183, 187 F-D) – Il ressort des articles 815-9, alinéa 2, et 815-10 du code civil que l’indemnité d’occupation due par un indivisaire pour la jouissance privative d’un immeuble indivis doit revenir à l’indivision.

Viole ces textes l’arrêt qui  déclare l’époux redevable d’une indemnité envers l’épouse, au titre de l’occupation du bien immobilier dépendant de l’indivision post-communautaire, alors que l’indemnité était due à l’indivision et devait entrer pour son montant total dans la masse active partageable.

NB – v. déjà Civ. 1re, 26 mai 1999, n° 97-11.904.

Prestation compensatoire et appel : date à laquelle le juge doit apprécier la situation des époux (Civ. 1re, 15 mars 2023, n° 20-20.730, 182 F-D) – Dès lors que  la déclaration d’appel critiquait expressément le chef du jugement prononçant le divorce, une cour d’appel ne pouvait, pour allouer à l’épouse une prestation compensatoire d’un montant de 20 000 €, retenir qu’en l’absence d’appel sur le prononcé du divorce celui-ci est devenu définitif dès la production des premières conclusions d’appel et que la situation des époux à prendre en considération est donc celle qui a été présentée au premier juge et non celle qui est soumise à la cour. Ce faisant, elle a violé le principe d’obligation pour le juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis.

NB – Encore une fois, on ne peut que regretter qu’un traitement certainement un peu trop rapide des magistrats prolonge ainsi le contentieux.

  • Droit pénal de la famille

Non-représentation d’enfant : recevabilité de l’opposition et appréciation souveraine des juges du fond (Crim., 15 mars 2023, n° 22-82.447, 00318 F-D) – Il ne peut être invoqué pour la première fois en appel le fait que la signification tardive de l’ordonnance par laquelle le conseiller de la mise en état a fixé en faveur du père un droit de visite et d’hébergement ait placé la mère dans l’impossibilité de se conformer à ses dispositions. Et dès lors qu’il revenait à la cour d’appel d’analyser le comportement de la prévenue pour établir si l’infraction était constituée, en particulier en son élément moral, à chacune des dates visées par la prévention, elle pouvait, à cette fin, apprécier librement le contenu des preuves soumises à la discussion contradictoire devant elle, ce qui lui permettait d’éclairer le comportement de la prévenue à une date déterminée en prenant en considération le contenu de correspondances ultérieures.

Conditions de qualification d’une agression sexuelle incestueuse (Crim. 15 mars 2023, n° 21-87.389, 00200 FP-B) – Selon l’article  222-22-3 du code pénal, les viols et les agressions sexuelles sont qualifiés d’incestueux lorsqu’ils sont commis par le partenaire lié par un pacte civil de solidarité à l’ascendant, le frère, la soeur, l’oncle, la tante, le grand-oncle, la grand-tante, le neveu ou la nièce de la victime, s’il a sur cette dernière une autorité de droit ou de fait.

Selon l’article 593 du code de procédure pénale, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.

Ne caractérise pas l’existence d’une autorité, de droit ou de fait, de l’auteur sur la victime la cour d’appel qui se borne à relever que celle-ci l’a été par lui en qualité de personne liée par un pacte civil de solidarité à la tante de la victime.

NB – Cette décision sera prochainement commentée dans l’AJ famille par Laurent SAENKO.

  • Etat civil

La protection subsidiaire ne dispense pas de légalisation (Civ. 1re, 15 mars 2023, n° 22-18.147, n° 232 FS-B) – L’intéressé ayant été placé sous la protection de l’OFPRA au titre de la protection subsidiaire et la Convention relative à la coopération internationale en matière d’aide administrative accordée aux réfugiés, signée à Bâle le 3 septembre 1985 – qui dispense de légalisation  les documents concernant l’identité et l’état civil produits par les réfugiés et émanant de leurs autorités d’origine – ne s’appliquant pas aux bénéficiaires de la protection subsidiaire, la cour d’appel a pu écarter, faute de légalisation (imposée par l’art. 16, II, al. 1er, de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, alors applicable), la force probante reconnue par l’article 47 du code civil à l’acte de naissance afghan produit par l’intéressé.

  • Mariage

Le juge, avant de prononcer la nullité du second mariage en Algérie d’un Français avec une Algérienne, doit vérifier si les conditions exigées pour la reconnaissance des décisions étrangères ayant confirmé le premier mariage coutumier étaient réunies (Civ. 1re, 15 mars 2023, n° 21-12.493, 183 F-D)

L’article 4 de la Convention franco-algérienne du 27 août 1964 impose au juge devant qui est invoquée une décision rendue dans l’autre État de vérifier, d’office, si celle-ci remplit les conditions prévues à l’article 1er de la convention pour jouir de plein droit de l’autorité de chose jugée et de constater, dans sa propre décision, le résultat de cet examen.

Pour prononcer la nullité du mariage célébré le 7 octobre 2010, l’arrêt retient que les autorités de justice algériennes ont reconnu le mariage coutumier contracté le 20 novembre 2006 entre l’homme et une précédente épouse et qu’il convient d’en tirer les conséquences, en faisant application de l’article 147 du code civil qui interdit de contracter un second mariage avant la dissolution du premier.

En se déterminant ainsi, sans vérifier, comme il le lui incombait, si les conditions exigées pour la reconnaissance des décisions étrangères ayant confirmé le mariage coutumier étaient réunies, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1er et 4 de la Convention franco-algérienne du 27 août 1964.

  • Régime matrimonial

Prescription de la demande en liquidation de la créance de participation et dispositif du jugement (Civ. 1re, 15 mars 2023, n° 21-14.541, 185 F-D) – Le premier juge ayant, dans les motifs de sa décision, jugé irrecevable comme prescrite la demande de l’épouse en liquidation de sa créance de participation sans l’examiner au fond, le moyen, qui relève une simple impropriété des termes du dispositif du jugement rejetant ses demandes, confirmé par la cour d’appel, sans caractériser un excès de pouvoir, est inopérant.

NB – V. déjà, à propos d’une action en contrefaçon, Civ. 1re, 8 mars 2023, n° 21-19.275.

 

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