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Sélection jurisprudentielle : assistance éducative, autorité parentale, divorce, état civil, divorce, filiation et libéralités

02/12/2022

Jurisprudence3Encore une semaine riche en décisions :

  • assistance éducative
  • autorité parentale
  • divorce/DIP
  • état civil
  • divorce
  • filiation
  • libéralités/succession

 

  • Assistance éducative

Droit du kafil de consulter le dossier de l’enfant (Civ. 1re, 30 nov. 2022, n° 21-16.366, 865 F-B) – Il résulte de l’article 16 du code de procédure civile que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue contradictoirement. Cette exigence implique que chaque partie ait la faculté de prendre connaissance et de discuter de toute pièce présentée au juge.

Il résulte de la combinaison des articles 1182, 1187 et 1193 du même code qu’en matière d’assistance éducative le dossier peut être consulté, sur leur demande et aux jours et heures fixés par le juge, par les parties jusqu’à la veille de l’audience. Les convocations les informent de cette possibilité de consulter le dossier.

En l’occurrence, il ne résulte ni des énonciations de l’arrêt ni des pièces de la procédure que le kafil – qui contestait le placement de l’enfant recueilli –  ait été avisé de la faculté qui lui était ouverte de consulter le dossier au greffe.  En procédant ainsi, alors qu’il n’est pas établi qu’il ait été mise en mesure de prendre connaissance, avant l’audience, des pièces présentées à la juridiction et, par suite, de les discuter utilement, la cour d’appel a violé les articles 16, 1182, 1187 et 1193 du code de procédure civile. 

NB – Cette décision sera prochainement commentée par Laurent Gebler dans les colonnes de l’AJ famille.

  • Autorité parentale

Déclaration judiciaire de délaissement parental de l’enfant (Civ. 1re, 30 nov. 2022, n° 20-22.903, 873 F-B) – Le fait pour le parent de ne se saisir ni de son droit de visite médiatisée ni de son droit de correspondance médiatisé justifie le prononcé de la déclaration judiciaire de délaissement parental alors que  les démarches destinées à restaurer le lien avec l’enfant et entreprises par le service gardien sous le contrôle du juge pendant plusieurs années avaient maintenu l’enfant dans un état d’insécurité affective et entravé son bon développement, des progrès de celui-ci ayant été constatés depuis la fin des visites obligatoires.

NB – Cette décision sera prochainement commentée par Blandine Mallevay dans les colonnes de l’AJ famille.

 

Inactivité injustifiée de la procédure privant une mère de contacts supplémentaires avec son enfant pendant 7 mois : violation de l’article 8 Conv. EDH (CEDH, 1er déc. 2022, M. H. c/ Pologne, n° 73247/14) – Si la violation de l’article 8 de la Conv. EDH est reconnue, la Cour souligne toutefois dans cette affaire en perpétuelle évolution que, à l’exception de la période comprise entre le 26 juillet 2011 et le 28 février 2012, les procédures devant la première instance et devant la cour d’appel n’ont pas été marquées par de longues périodes d’inactivité.

  • Divorce

Prestation compensatoire : l’article 270 du code civil est irréprochable (Civ. 1re, 30 nov. 2022, n° 21-12.128,  860 FS-B) –  L’article 270 du code civil ménageant un juste équilibre entre le but poursuivi et la protection des biens du débiteur sur lequel elles ne font pas peser, par elles-mêmes, une charge spéciale et exorbitante, c’est sans violer l’article 1er du Protocole additionnel à la Conv. EDH que la cour d’appel a condamné l’épouse à payer à l’époux un capital de 50 000 euros à titre de prestation compensatoire.

Se trouvent donc écartés les arguments de l’épouse qui  faisait valoir le principe très général posé par ce texte d’attribution d’une prestation compensatoire à un époux visant à compenser la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives, sans prise en compte des causes du divorce, de la situation financière de l’époux demandeur qui devrait se trouver dans une situation de besoin ou de la cause de la disparité dans les conditions de vie respectives et sans limite de temps, au regard de la durée de vie restante des époux après leur divorce.

NB – Cette décision fait suite à une précédente de la Cour de cassation qui avait refusé de renvoyer au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité (Civ. 1re, 14 sept. 2021, n° 21-12.128, 648 F-D). Elle sera prochainement commentée par Jérôme Casey dans les colonnes de l’AJ famille.

 

Compétence du juge français pour connaître du divorce de deux époux belges qui ont leur résidence habituelle en France (Civ. 1re, 30 nov. 2022, n° 21-15.988, 857 FS-B) – Dans cette affaire, la Cour de cassation rappelle qu’il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 25 nov. 2021, C-289/20) que la notion de “résidence habituelle” au sens de l’article 3, § 1, sous a), du règlement qui permet de fonder la compétence du juge français est caractérisée, en principe, par deux éléments, à savoir :

  • d’une part, la volonté de l’intéressé de fixer le centre habituel de ses intérêts dans un lieu déterminé
  • et, d’autre part, une présence revêtant un degré suffisant de stabilité sur le territoire de l’État membre concerné (point 57), l’environnement d’un adulte étant de nature variée, composé d’un vaste spectre d’activités et d’intérêts, notamment professionnels, socioculturels, patrimoniaux ainsi que d’ordre privé et familial, diversifiés (point 56).

Dans cette affaire, la cour d’appel a relevé qu’après avoir vécu pendant longtemps à l’étranger en raison de l’activité professionnelle de l’époux, les époux, tous deux de nationalité belge, propriétaires, en Belgique, d’une maison occupée par leur fille aînée depuis 2013, et d’une villa en France, louée jusque fin 2017, étaient revenus en Europe en mai 2018, date à laquelle, tout en déclarant leur résidence principale en Belgique, ils avaient fait déménager divers meubles de Belgique en France, pour s’y installer eux-mêmes début juin 2018.  Elle a constaté que la villa, d’abord assurée en tant que résidence secondaire, était désormais assurée sans précision particulière et que le couple y avait entrepris divers travaux d’entretien et de réparation, en effectuant la quasi-totalité de ses dépenses courantes là où était située la villa ou dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, où il avait développé un réseau relationnel et amical. Elle a relevé encore que, depuis leur installation, les époux résidaient essentiellement dans leur villa et ne rentraient que pour de courts séjours à l’étranger, où ils avaient conservé des intérêts administratifs et financiers.

Elle en a souverainement déduit que, à partir du mois de juin 2018, les époux avaient eu la volonté de fixer au lieu de leur villa le centre habituel de leurs intérêts en y menant une vie sociale suffisamment stable, de sorte que leur résidence habituelle au sens du texte précité se trouvait en France.

Elle a ainsi légalement justifié sa décision déclarant le juge français compétent pour connaître de l’instance en divorce introduite par l’épouse.

  • État civil

Imprécision de la législation géorgienne relative à la modification de la mention du sexe à l’état civil (CEDH, 1er déc. 2022, A.D. et a. c/ Géorgie,  n° 57864/17) – Selon le communiqué de presse de la CEDH, “Hommes transgenres (assignés de sexe féminin à la naissance), les requérants se plaignaient de ne pas avoir pu obtenir la reconnaissance juridique de leur genre faute d’avoir recouru à une opération chirurgicale de conversion sexuelle. La Cour observe en particulier que même si le droit de faire modifier la mention de son sexe à l’état civil est reconnu en Géorgie depuis 1998, il semble n’y avoir eu aucun cas de reconnaissance juridique du genre depuis cette date. L’imprécision de la législation interne en vigueur a compromis dans la pratique la possibilité de reconnaissance juridique du genre, et l’absence d’un cadre juridique clair a laissé aux autorités nationales un pouvoir discrétionnaire excessif susceptible de conduire à des décisions arbitraires dans l’examen des demandes en la matière. Cette situation est fondamentalement contraire à l’obligation pesant sur l’État défendeur de mettre en place des procédures permettant la reconnaissance juridique du genre de manière rapide, transparente et accessible.“

  • Filiation

De l’effet de la reconnaissance d’un enfant qui a déjà une filiation légalement établie (Civ. 1re, 30 nov. 2022, n° 21-14.726, 864 F-B) – Aux termes de l’article 320 du code civil, tant qu’elle n’a pas été contestée en justice, la filiation légalement établie fait obstacle à l’établissement d’une autre filiation qui la contredirait.

Il résulte de ce texte que la reconnaissance d’un enfant qui a déjà une filiation légalement établie n’est pas nulle, mais est seulement privée d’effet, tant que cette filiation n’a pas été anéantie en justice. Après avoir retenu que l’époux de la mère n’était pas le père de l’enfant, la cour d’appel a constaté que celle-ci avait été reconnue par le prétendu père. Elle en a déduit à bon droit que cette reconnaissance produisait ses effets, hors toute action en établissement de paternité.

NB – Cette affaire a déjà fait l’objet d’une décision très remarquée de la Cour de cassation : Civ., 1re, 4 mars 2020, n° 18-26.661, AJ fam. 2020. 255, obs. J. Houssier.

 

  • Libéralités

Acte révocatoire de donation : le juge aurait dû rechercher si la cause de l’acte ne résidait pas dans la volonté des parties de contourner les dispositions d’ordre public de l’article 922 du code civil (Civ. 1re, 30 nov. 2022, n° 21-11.507, 859 FS-B) –  Il résulte des articles 1131 et 1133, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, qu’un contrat n’est valable que si les motifs ayant déterminé les parties à contracter sont licites.

Pour déclarer valable l’acte révocatoire de donation du 11 juillet 2005, une cour d’appel retient que les mobiles ayant présidé à la révocation de la donation du 9 juin 1994 sont indifférents et ne peuvent se confondre avec la cause de la convention qui n’était pas illicite, la révocation conventionnelle d’une donation ne se heurtant à aucune interdiction légale et étant toujours possible sans que les parties n’aient à en justifier les raisons. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la cause de l’acte révocatoire ne résidait pas dans la volonté des parties de contourner les dispositions d’ordre public de l’article 922 du code civil, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.

NB – Cette décision sera prochainement commentée par Nathalie Levillain dans les colonnes de l’AJ famille.

 

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