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Divorce, médiation, pacs, changement de nom et prénom, état civil des transsexuels, déjudiciarisation de la procédure de surendettement, le Conseil constitutionnel valide

18/11/2016

Saisi le 17 octobre 2016, le Conseil constitutionnel avait un mois pour se prononcer  sur la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle. Et c’est hier, dernier jour du délai, qu’il a rendu sa décision. Au final, il ne censurera que quelques cavaliers législatifs ou pour contrariété avec la « règle de l’entonnoir » et notamment la possibilité d’adjoindre le nom de l’un ou l’autre de ses parents à son nom de naissance. Pour le reste et pour ce qui nous concerne, il a jugé conformes à la Constitution les articles 6 et 7, 3°, relatifs à l’exclusion de la médiation en cas de violences conjugales, les articles 48, 56 et 57 , I, 1°, III, 1° et 2°,  qui transfèrent aux officiers de l’état civil l’enregistrement des pactes civils de solidarité (PACS), la procédure de changement de prénom et certaines demandes de changement de nom, l’article 50 qui crée une procédure conventionnelle de divorce par consentement mutuel, le paragraphe II de l’article 56 qui modifie le traitement des demandes de changement de sexe à l’état civil et l’article 58 qui supprime l’homologation judiciaire nécessaire au caractère exécutoire de certaines décisions de la commission de surendettement.

On notera également que le Conseil ne trouve rien à redire à la méthode employée par le Gouvernement pour parvenir à ses fins : procédure accélérée et introduction à l’Assemblée nationale de nombreuses dispositions nouvelles par voie d’amendement sans étude d’impact.

– Sur la procédure d’adoption de l’ensemble de la loi : 

en dépit du cumul de l’engagement de la procédure accélérée et de l’introduction de nombreuses dispositions par voie d’amendement, la loi déférée n’a pas été adoptée selon une procédure contraire à la Constitution.

 

– Sur l’exclusion de la médiation en cas de violences familiales

21. Le deuxième alinéa de l’article 373-2-10 du code civil prévoit que le juge aux affaires familiales peut proposer aux parents une mesure de médiation afin de faciliter la recherche d’un exercice consensuel de l’autorité parentale. Le troisième alinéa de cet article prévoit que le juge aux affaires familiales peut enjoindre aux parents de recevoir une information sur l’objet et le déroulement de cette mesure de médiation. L’article 6 de la loi déférée modifie le troisième alinéa de l’article 373-2-10 pour interdire au juge aux affaires familiales de prononcer l’injonction mentionnée ci-dessus, en cas de violences commises par l’un des parents sur l’autre parent ou sur l’enfant.

22. L’article 15 de la loi du 13 décembre 2011 mentionnée ci-dessus prévoyait, à titre expérimental, que la saisine du juge par les parents aux fins de modification d’une décision fixant les modalités d’exercice de l’autorité parentale ou fixant la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant doit être précédée d’une tentative de médiation familiale. L’article 7 de la loi déférée renouvelle cette expérimentation. Toutefois, le 3° de cet article 7 dispense les parents de cette tentative de médiation lorsque des violences ont été commises par l’un des parents sur l’autre parent ou sur l’enfant.

23. Les sénateurs requérants soutiennent que l’article 6 et le 3° de l’article 7 méconnaissent l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi dès lors qu’ils ne précisent pas si les violences doivent être constatées par le juge ou simplement alléguées. Ils reprochent également au 3° de l’article 7 de ne pas prévoir les modalités d’évaluation de l’expérimentation qu’il institue.

24. En adoptant l’article 6, le législateur n’a pas entendu subordonner l’interdiction faite au juge aux affaires familiales d’enjoindre aux parents de recevoir une information sur l’objet et le déroulement d’une mesure de médiation en cas de violences intrafamiliales à la condition que ces violences aient donné lieu à condamnation pénale ou au dépôt d’une plainte. Il n’a pas davantage entendu dispenser les parents séparés de faire une tentative de médiation dans ces seules hypothèses. Il appartiendra donc au juge d’apprécier la réalité des violences pour l’application du troisième alinéa de l’article 373-2-10 du code civil et du 3° de l’article 7 de la loi déférée.

25. En second lieu, aucune exigence constitutionnelle n’impose au législateur de déterminer les modalités de l’évaluation consécutive à une expérimentation.

26. L’article 6 et le 3° de l’article 7, qui ne méconnaissent ni l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi ni aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution.

– Sur l’enregistrement du pacs, le changement de prénom ou de nom en mairie

27. L’article 48 de la loi déférée confie aux officiers de l’état civil l’enregistrement des conclusions, modifications et dissolutions de pactes civils de solidarité, actuellement dévolu aux greffes des tribunaux d’instance. Le paragraphe I de l’article 56, qui réécrit l’article 60 du code civil relatif aux demandes de changement de prénom, transfère à l’officier d’état civil le traitement de ces demandes relevant aujourd’hui du juge aux affaires familiales. Le 1° du paragraphe I de l’article 57 de la loi déférée introduit une dérogation à la procédure de changement de nom par décret, en donnant compétence aux officiers de l’état civil pour autoriser les demandes de changement de nom des personnes inscrites sur le registre de l’état civil d’un autre État. Les 1° et 2° du paragraphe III de l’article 57 modifient l’ordonnance du 8 mars 2000 mentionnée ci-dessus pour instituer, à Mayotte, les mêmes procédures de changement de prénom et de nom.

28. Les députés requérants reprochent à ces dispositions de transférer aux officiers de l’état civil, sans compensation financière aux communes, l’enregistrement des pactes civils de solidarité ainsi que le traitement des demandes de changement de prénom et de certaines demandes de changement de nom. Il en résulterait une méconnaissance de l’article 40 de la Constitution, du principe de libre administration des collectivités territoriales reconnu à son article 72 et du principe de compensation financière prévu au quatrième alinéa de son article 72-2.

29. Selon l’article 72 de la Constitution, les collectivités territoriales s’administrent librement par des conseils élus « dans les conditions prévues par la loi ». Selon le quatrième alinéa de son article 72-2 : « Tout transfert de compétences entre l’État et les collectivités territoriales s’accompagne de l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi ».

30. En premier lieu, les compétences confiées aux officiers de l’état civil en matière d’enregistrement des pactes civils de solidarité et de changement de prénom ou de nom sont exercées au nom de l’État. Par conséquent, est inopérant le grief tiré de la méconnaissance du quatrième alinéa de l’article 72-2 de la Constitution, dont les dispositions ne sont relatives qu’aux compétences exercées par les collectivités territoriales.

31. En deuxième lieu, si les dispositions contestées sont susceptibles d’entraîner un accroissement de charges pour les communes, elles n’ont, eu égard au montant des sommes en jeu, pas pour effet de dénaturer la libre administration de ces collectivités. Le grief tiré de la violation de l’article 72 de la Constitution doit donc être écarté.

32. En dernier lieu, les dispositions critiquées ayant été introduites à l’initiative du Gouvernement, le grief fondé sur l’article 40 de la Constitution est inopérant.

33. Par conséquent, l’article 48, le paragraphe I de l’article 56, le 1° du paragraphe I et les 1° et 2° du paragraphe III de l’article 57, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution.

– Sur le divorce par consentement mutuel déjudiciarisé

34. L’article 50 crée une procédure non judiciaire de divorce par consentement mutuel, intitulée « divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d’un notaire », se substituant à la procédure judiciaire actuelle.
35. Son paragraphe I insère, au sein du titre VI du livre Ier du code civil, quatre articles 229-1 à 229-4 définissant le principe et le régime juridique de cette nouvelle procédure. En application de l’article 229-1, s’ils s’entendent sur la rupture de leur mariage et ses effets, les époux peuvent, à la condition d’être chacun assisté d’un avocat, constater leur accord, par acte sous seing privé, dans une convention contresignée par chacun de ces avocats et déposée au rang des minutes d’un notaire. L’article 229-2 interdit le recours à cette nouvelle procédure de divorce si l’un des enfants mineurs du couple a demandé à être entendu par le juge. Il appartient aux parents d’informer l’enfant de cette faculté. En application de l’article 229-3, la convention de divorce doit faire mention de la délivrance de cette information ainsi que du choix de l’enfant de renoncer à cette faculté. Il appartient au notaire de s’assurer du respect de cette formalité. L’article 229-4 impose à chaque époux un délai de réflexion de quinze jours avant de signer la convention, à compter du moment où le projet lui a été adressé par son avocat. Cet article reconnaît force exécutoire à cette convention au jour où elle acquiert date certaine. En application des articles 229, 230 et 247 du code civil dans leur rédaction résultant du même paragraphe I, l’actuelle procédure judiciaire de divorce par consentement mutuel ne serait plus utilisée que lorsqu’un enfant a demandé à être entendu par un juge.
36. Le paragraphe I de l’article 50 de la loi déférée modifie également plusieurs articles du code civil afin de faire produire à cette nouvelle procédure de divorce non judiciaire les mêmes effets que l’actuelle procédure judiciaire de divorce par consentement mutuel. Les paragraphes II à VI de ce même article 50 procèdent de même au sein du code des procédures civiles d’exécution, du code de la sécurité sociale, du code général des impôts, du code pénal et de la loi du 11 juillet 1975 mentionnée ci-dessus. Le paragraphe VII de l’article 50 modifie la loi du 10 juillet 1991 mentionnée ci-dessus, afin de prévoir la prise en charge au titre de l’aide juridictionnelle des frais d’avocat des époux divorçant selon la nouvelle procédure ainsi créée.

. En ce qui concerne les griefs tirés de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi :
37. Les députés et les sénateurs requérants font valoir que l’article 50 méconnaît le principe d’égalité devant la loi. Pour les députés requérants, en imposant aux époux le recours à deux avocats et à un notaire, et en renchérissant ainsi le coût du divorce, les dispositions contestées créent une première rupture d’égalité entre les couples, pour l’accès à la nouvelle procédure de divorce, selon leur fortune. Une deuxième rupture d’égalité serait instaurée entre les parents dont l’un des enfants demanderait à être entendu et les autres parents, puisque la nature, judiciaire ou non, de la procédure de divorce dépend de cette demande. Pour les sénateurs requérants, en liant indissolublement audition de l’enfant et déclenchement de la procédure judiciaire, les dispositions contestées excluent du bénéfice de la protection particulière qu’apporte cette procédure, les enfants qui, faute d’être capables de discernement, ne peuvent demander à être entendus par un juge ainsi que ceux qui ne le demanderont pas, afin de ne pas s’opposer au souhait de leurs parents de privilégier un règlement non judiciaire du divorce. En outre, selon eux, l’article 50 introduit une autre rupture d’égalité injustifiée entre les enfants dont les parents divorcent par consentement mutuel selon la procédure conventionnelle et ceux dont les parents divorceront selon une autre procédure, puisque seuls ces derniers voient leurs intérêts protégés par un juge.
38. Aux termes de l’article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles concernant « l’état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et libéralités ». Il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, d’adopter des dispositions nouvelles dont il lui appartient d’apprécier l’opportunité et de modifier des textes antérieurs ou d’abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d’autres dispositions, dès lors que, dans l’exercice de ce pouvoir, il ne prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel. L’article 61 de la Constitution ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement mais lui donne seulement compétence pour se prononcer sur la conformité à la Constitution des lois déférées à son examen.
39. Aux termes de l’article 6 de la Déclaration de 1789 : « La loi … doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ». Le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit. Si, en règle générale, ce principe impose de traiter de la même façon des personnes qui se trouvent dans la même situation, il n’en résulte pas pour autant qu’il oblige à traiter différemment des personnes se trouvant dans des situations différentes.
40. En premier lieu, dans le cadre de la nouvelle procédure de divorce qu’elles instituent, les dispositions contestées ont pour effet d’imposer à chacun des époux d’être assisté par son propre avocat. En soumettant ainsi à une même obligation tous les époux ayant recours à cette procédure, le législateur, qui leur a d’ailleurs ouvert le bénéfice de l’aide juridictionnelle, n’a pas méconnu le principe d’égalité devant la loi.
41. En deuxième lieu, en prévoyant que lorsque l’un des enfants mineurs du couple demande à être entendu par un juge, les époux ne peuvent plus divorcer par consentement mutuel par la voie conventionnelle, mais seulement par la voie judiciaire, les dispositions contestées ne créent, par elles-mêmes, aucune différence de traitement entre les couples.
42. En troisième lieu, d’une part, l’article 371-1 du code civil, qui définit l’autorité parentale comme un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant, impose aux parents d’associer l’enfant aux décisions qui le concernent selon son âge et son degré de maturité. D’autre part, en application de l’article 388-1 du code civil, tout mineur capable de discernement peut être entendu par un juge, dans toute procédure le concernant. Enfin, en application des articles 229, 229-2 et 230 du code civil, dans leur rédaction résultant de l’article 50 de la loi déférée, combinés avec l’article 388-1 du même code, le choix d’un enfant mineur capable de discernement de demander à être entendu par le juge fait obstacle à la poursuite de la procédure conventionnelle de divorce de ses parents, au profit de la procédure judiciaire. Dans ce cadre, il appartient alors au juge, conformément à l’article 232 du code civil, de refuser l’homologation et de ne pas prononcer le divorce « s’il constate que la convention préserve insuffisamment les intérêts des enfants ou de l’un des époux ».
43. Ainsi, le texte déféré accorde au mineur qui a demandé à être entendu par le juge une protection spécifique. Or, il réserve aux mineurs capables de discernement la faculté de demander à être entendu par le juge. Par conséquent, les dispositions contestées instaurent, au regard de la protection judiciaire dont ils peuvent bénéficier, une différence de traitement entre ces mineurs et les autres enfants. Toutefois, cette différence de traitement repose sur une différence de situation entre les mineurs capables de discernement, qui sont en mesure de s’exprimer sur la situation résultant pour eux du choix de leurs parents, et les autres. Cette différence de traitement entre les mineurs, qui bénéficient en tout état de cause de la protection qui découle des exigences de l’autorité parentale, est en rapport direct avec l’objet de la loi. Elle n’entraîne donc pas de rupture d’égalité contraire à la Constitution.
44. En dernier lieu, les enfants dont les parents divorcent par consentement mutuel ne sont pas placés dans la même situation que ceux dont les parents divorcent selon une autre procédure. L’intervention judiciaire systématique dans le second cas est justifiée par le fait que les époux n’ont pas trouvé un accord sur le principe ou les effets de leur divorce. La différence de traitement qui en résulte est en rapport direct avec l’objet de la loi et ne méconnaît par conséquent pas le principe d’égalité.
45. Il résulte de tout ce qui précède que l’article 50 ne méconnaît pas le principe d’égalité.

. En ce qui concerne les autres griefs : 46. Les députés requérants font valoir qu’en autorisant le divorce conventionnel, sans intervention du juge, les dispositions contestées portent atteinte au « caractère d’ordre public du droit de la famille » découlant, selon eux, du dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946. Ils estiment aussi que la nouvelle procédure ainsi créée, qui prive le conjoint le plus faible de la protection judiciaire et l’expose au risque d’une convention de divorce protégeant insuffisamment ses intérêts, méconnaît les « principes généraux du droit civil », ainsi que le onzième alinéa du Préambule de 1946. Enfin, selon eux, en ne garantissant pas suffisamment l’information du mineur sur son droit à être entendu par le juge et en faisant peser sur lui la responsabilité du renoncement à la procédure conventionnelle, les dispositions contestées méconnaissent tout à la fois, l’article 388-1 du code civil, les « principes du droit du divorce qui placent l’intérêt de l’enfant au cœur du dispositif législatif », la convention des internationale des droits de l’enfant et le onzième alinéa du Préambule de 1946.
47. Les sénateurs requérants reprochent, pour leur part, au législateur d’avoir méconnu l’étendue de sa compétence faute d’avoir prévu, pour tous les enfants des couples concernés, un niveau de protection suffisant.
48. Le droit de mener une vie familiale normale résulte du dixième alinéa du Préambule de 1946 qui dispose : « La Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ».
49. En premier lieu, il était loisible au législateur, compétent pour fixer les règles du divorce, de substituer à la procédure judiciaire de divorce par consentement mutuel une procédure conventionnelle.
50. En deuxième lieu, le législateur a veillé à assortir cette nouvelle procédure de divorce de garanties destinées à assurer la protection des époux. Il a ainsi interdit d’y recourir si l’un des époux est placé sous un régime de protection juridique. Il a par ailleurs imposé à chacun d’entre eux l’assistance d’un avocat et prévu le respect d’un délai de réflexion de quinze jours, une fois le projet de convention de divorce établi, avant sa signature. Enfin, il a subordonné le caractère exécutoire de cette convention à son dépôt au rang des minutes d’un notaire, chargé d’en apprécier la validité formelle.
51. En troisième lieu, le législateur a prévu, afin d’assurer la protection de l’intérêt de l’enfant, que ce dernier, s’il est capable de discernement, soit informé par ses parents de son droit à être entendu par le juge. En outre, il a exigé qu’il soit fait mention, sous le contrôle du notaire, dans la convention de divorce, de la délivrance de cette information et du souhait du mineur de ne pas faire usage de cette faculté. Si, en revanche, le mineur demande à être entendu, la procédure conventionnelle doit être abandonnée au profit de la procédure judiciaire. Le juge est alors chargé de s’assurer que la convention ne porte pas préjudice aux intérêts du mineur. En outre, conformément à l’article 373-2-13 du code civil, dans sa rédaction résultant de l’article 50 de la loi déférée, le juge aux affaires familiales peut être saisi, après le divorce, des dispositions de cette convention relatives à l’exercice de l’autorité parentale.
52. Compte tenu des garanties ainsi apportées à la procédure conventionnelle de divorce par consentement mutuel qu’il a instaurée, le législateur n’a méconnu ni le dixième alinéa du Préambule de 1946, ni l’étendue de sa compétence.
53. Par ailleurs, les griefs tirés de la méconnaissance de la convention internationale des droits de l’enfant mentionnée ci-dessus ainsi que de la méconnaissance de principes ou de dispositions à valeur législative et non constitutionnelle sont inopérants.
54. Il résulte de tout ce qui précède que l’article 50 qui ne méconnaît pas non plus le onzième alinéa du Préambule de 1946 ni aucune autre exigence constitutionnelle est conforme à la Constitution.

– Sur la possibilité d’adjoindre le nom de l’un ou l’autre de ses parents à son nom de naissance

55. Le 5° de l’article 51 modifie l’article 61 du code civil pour prévoir qu’une demande de changement de nom peut être justifiée par la volonté, pour un enfant majeur, d’adjoindre le nom de l’un ou l’autre de ses parents à son nom de naissance.
56. Les sénateurs requérants soutiennent que ces dispositions, introduites en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, l’ont été en méconnaissance de l’article 45 de la Constitution, faute d’être en relation directe avec une disposition restant en discussion.
57. Il ressort de l’article 45 de la Constitution et notamment de la première phrase de son premier alinéa, selon laquelle : « Tout projet ou proposition de loi est examiné successivement dans les deux assemblées du Parlement en vue de l’adoption d’un texte identique », que les adjonctions ou modifications qui peuvent être apportées après la première lecture par les membres du Parlement et par le Gouvernement doivent être en relation directe avec une disposition restant en discussion. Toutefois, ne sont pas soumis à cette dernière obligation les amendements destinés à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec des textes en cours d’examen ou à corriger une erreur matérielle.
58. Les dispositions du 5° de l’article 51 n’étaient pas, au stade de la nouvelle lecture, en relation directe avec une disposition restant en discussion. Elles n’étaient pas non plus destinées à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec des textes en cours d’examen ou à corriger une erreur matérielle. Adoptées selon une procédure contraire à la Constitution, elles lui sont donc contraires.

– Sur la modification du sexe à l’état civil

59. Le paragraphe II de l’article 56 crée, dans le chapitre II du titre II du livre Ier du code civil, une section 2 bis intitulée « De la modification de la mention du sexe à l’état civil », comprenant les articles 61-5, 61-6, 61-7 et 61-8. L’article 61-5 prévoit que toute personne majeure ou mineure émancipée qui prouve, par une réunion suffisante de faits, que la mention relative à son sexe à l’état civil ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue, peut en obtenir la modification. Ce même article 61-5 énumère une liste indicative de trois principaux faits susceptibles de révéler le changement de sexe dont la preuve peut être rapportée par tout moyen : se présenter publiquement comme appartenant au sexe revendiqué ; être connu sous le sexe revendiqué de son entourage familial, amical ou professionnel ; avoir obtenu le changement de son prénom afin qu’il corresponde au sexe revendiqué. L’article 61-6 confie au tribunal de grande instance le soin de statuer sur les demandes de changement de sexe à l’état civil. Il dispose, par ailleurs, que le fait de ne pas avoir subi de traitements médicaux, d’opération chirurgicale ou de stérilisation ne peut fonder le refus d’une telle demande. En vertu de l’article 61-7, la mention du changement de sexe et, le cas échéant, de prénom est portée en marge de l’acte de naissance de l’intéressé à la requête du procureur de la République.
60. Les sénateurs requérants soutiennent que le paragraphe II de l’article 56 a été introduit en première lecture à l’Assemblée nationale alors que ces dispositions sont dépourvues de lien, même indirect, avec le projet de loi initial. Ces dispositions auraient donc été adoptées en méconnaissance du premier alinéa de l’article 45 de la Constitution.
61. Les députés requérants soutiennent qu’en attribuant à l’officier d’état civil la compétence pour connaître des demandes de changement de sexe, le législateur a méconnu le second alinéa de l’article 66 de la Constitution dès lors que cette matière relève de la liberté individuelle. Ils soutiennent également que l’abandon de l’exigence d’une attestation médicale démontrant la perte totale ou partielle des caractères de son sexe d’origine pour obtenir un changement de sexe à l’état civil porte atteinte au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine.
62. En premier lieu, selon la dernière phrase du premier alinéa de l’article 45 de la Constitution : « Sans préjudice de l’application des articles 40 et 41, tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ».
63. Les dispositions du paragraphe II de l’article 56 de la loi déférée, relatives à la modification de la mention du sexe à l’état civil, ont été introduites en première lecture à l’Assemblée nationale. Cependant, ce paragraphe II ne peut être regardé comme dépourvu de lien, même indirect, avec le projet de loi déposé sur le bureau du Sénat, qui comportait des dispositions relatives à l’état civil et à la compétence des autorités judiciaires en la matière. Le grief tiré de la méconnaissance du premier alinéa de l’article 45 de la Constitution doit donc être écarté.
64. En deuxième lieu, selon le second alinéa de l’article 66 de la Constitution : « L’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ».
65. Toutefois, la modification de la mention du sexe à l’état civil n’entre pas dans le champ de l’article 66 de la Constitution. Par conséquent, le grief tiré de la méconnaissance de cet article est inopérant.
66. En dernier lieu, il ressort du Préambule de 1946 que la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d’asservissement et de dégradation est un principe à valeur constitutionnelle.
67. En permettant à une personne d’obtenir la modification de la mention de son sexe à l’état civil sans lui imposer des traitements médicaux, des interventions chirurgicales ou une stérilisation, les dispositions ne portent aucune atteinte au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine. Le grief tiré de la méconnaissance de ce principe manque en fait.
68. Les dispositions du paragraphe II de l’article 56, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution.

– Sur la suppression de l’homologation judiciaire des décisions de la commission de surendettement 

69. Les dispositions du paragraphe I de l’article 58 modifient plusieurs articles du livre VII du code de la consommation. Elles ont notamment pour objet de supprimer l’homologation judiciaire nécessaire au caractère exécutoire de certaines décisions de la commission de surendettement accordant le rééchelonnement, la remise ou la suspension d’exigibilité de créances. Ainsi le 15° de ce paragraphe réécrit l’article L. 733-4 du code de la consommation, lequel prévoit dans son 1° que la commission de surendettement peut imposer, en cas de vente forcée ou amiable du logement principal du débiteur, sous certaines conditions, la réduction du montant de la fraction du prêt restant due aux établissements de crédit ou aux sociétés de financement après la vente. Le 2° de l’article L. 733-4 tel que réécrit permet également à la commission de surendettement d’imposer l’effacement partiel des créances. Ces mesures peuvent être combinées avec un rééchelonnement des dettes. Le 18° du paragraphe I de l’article 58 réécrit notamment les articles L. 741-1 et L. 741-2 du même code. L’article L. 741-1 dispose que la commission de surendettement peut imposer un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire. L’article L. 741-2 prévoit que celui-ci entraîne l’effacement de toutes les dettes non professionnelles du débiteur.
70. Les sénateurs requérants soutiennent tout d’abord que l’article 58 a été adopté en méconnaissance des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire dans la mesure où, d’une part, la procédure de surendettement a fait l’objet d’une réforme législative récente et où, d’autre part, une autre loi en cours de discussion aurait également pour effet de la modifier. Ils soutiennent enfin que les articles L. 733-4, L. 741-1 et L. 741-2 du code de la consommation issus des 15° et 18° du paragraphe I de l’article 58, en ce qu’ils permettent à la commission de surendettement de porter atteinte au droit de propriété des créanciers, méconnaissent la protection constitutionnelle de ce droit.

. En ce qui concerne la procédure d’adoption de l’article 58 :
71. La seule circonstance que des dispositions connexes à des dispositions en discussion devant le Parlement aient été modifiées par une loi récemment adoptée ou qu’elles soient en discussion concomitamment dans d’autres projets ou propositions de loi ne constitue pas une atteinte à l’exigence de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
72. L’article 58 a donc été adopté selon une procédure conforme à la Constitution.

. En ce qui concerne le grief tiré de l’atteinte au droit de propriété :
73. La propriété figure au nombre des droits de l’homme consacrés par les articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789. En l’absence de privation du droit de propriété au sens de l’article 17, il résulte néanmoins de l’article 2 que les atteintes portées à ce droit doivent être justifiées par un motif d’intérêt général et proportionnées à l’objectif poursuivi.
74. Les dispositions contestées, en ce qu’elles prévoient la possibilité pour la commission de surendettement d’imposer le rééchelonnement d’une créance et son effacement partiel ou total, portent atteinte au droit de propriété des titulaires de ces créances.
75. Toutefois, en premier lieu, en adoptant ces dispositions, le législateur a poursuivi un motif d’intérêt général de règlement des situations de surendettement.
76. En second lieu, d’une part, la commission de surendettement ne peut imposer le rééchelonnement de dettes et leur effacement partiel ou total que si le débiteur est dans l’impossibilité manifeste de faire face à l’ensemble de ses dettes non professionnelles. L’effacement total des dettes dans le cadre d’une décision de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ne peut en outre intervenir que si le débiteur se trouve dans une situation irrémédiablement compromise et ne possède que des biens meublants nécessaires à la vie courante, des biens non professionnels indispensables à l’exercice de son activité professionnelle, ou des biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale.
77. D’autre part, le rééchelonnement et l’effacement ne peuvent, sauf accord du créancier, porter sur les dettes alimentaires, les réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d’une condamnation pénale, les dettes ayant pour origine des manœuvres frauduleuses commises au préjudice de certains organismes de protection sociale et les amendes pénales. L’effacement ne peut non plus porter sur une créance dont le montant a été payé au lieu et place du débiteur par la caution ou le coobligé personnes physiques.
78. Enfin, ces mesures ne s’imposent qu’en l’absence de contestation par l’une des parties devant le juge du tribunal d’instance.
79. Compte tenu de l’objectif poursuivi et des garanties prévues, le législateur n’a pas, par les dispositions contestées, porté une atteinte disproportionnée au droit de propriété. Le grief tiré de la méconnaissance de l’article 2 de la Déclaration de 1789 doit donc être écarté. Les articles L. 733-4, L. 741-1 et L. 741-2 du code de la consommation issus des 15° et 18° du paragraphe I de l’article 58, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution.

Lire l’intégralité de la décision n° 2016-739 du 17 novembre 2016

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