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Divorce et liquidation du régime matrimonial : avec le nouvel article 267 du code civil, c’est maintenant possible !

04/10/2016

Avocat au barreau de Paris, membre du Conseil national des barreaux et présidente de la Commission Famille de l’ACE, Céline CADARS BEAUFOUR nous rend compte de l’atelier qu’elle a animé avec Michelle DAYAN, avocat au barreau de Paris et membre du Conseil de l’ordre, au 24e congrès de l’ACE qui s’est tenu à Ajaccio les 29 et 30 septembre 2016. Atelier qui avait pour thème le divorce et la liquidation du régime matrimonial.

Divorce et liquidation du régime matrimonial : avec le nouvel article 267 du code civil, c’est maintenant possible !

Il s’agit de comprendre les modalités de mise en œuvre des dispositions du nouvel article 267 du code civil.
Cet article permet au juge aux affaires familiales de liquider le régime matrimonial des époux en même temps qu’il prononce leur divorce.
Ce nouvel article 267 est déjà entré en vigueur et s’applique à toutes les instances en cours au 1er janvier 2016.
Les dispositions qu’il contient sont complexes.
Ne pas savoir les manier peut s’avérer dangereux au regard des pouvoirs renforcés conférés au juge du divorce qui statue désormais avec les mêmes pouvoirs que le juge liquidateur.
Attention, le juge du divorce peut désormais statuer même d’office sur le régime matrimonial applicable.
Eviter un long procès post-divorce relatif à la liquidation et au partage des intérêts pécuniaires des époux, tel a été l’objectif du législateur.

Qu’en est-il réellement ?

1 – Genèse – La Loi d’habilitation du 16 février 2015 a donné compétence au Gouvernement pour légiférer par voie d’ordonnances notamment en droit de la famille, afin de MODERNISER ET SIMPLIFIER certaine procédure.

En effet, un certains nombres de mesures de clarification du droit de la famille, se sont révélées nécessaire à la demande des praticiens qui se trouvaient confrontés à des jurisprudences contraires et confuses s’agissant notamment de la désignation ou non, d’un notaire lors du prononcé du divorce.

La loi d’habilitation du 16 février 2015 a donné compétence au Gouvernement pour « articuler, en cas de divorce, l’intervention du juge aux affaires familiales et la procédure de liquidation et de partage des intérêts patrimoniaux des époux, en renforçant les pouvoirs liquidatifs du juge saisi d’une demande en divorce pour lui permettre, le cas échéant, de prendre des décisions relatives à la liquidation et au partage de leurs intérêts patrimoniaux. »

Le but énoncé était donc de clarifier l’article 267 du code civil.

L’ordonnance du 15 octobre 2015 et le Décret du 23 février 2016 y sont-ils parvenus ?

2 -Le nouvel article 267 –  C’est ainsi que l’article 267 du code civil a été modifié par l’ordonnance du 15 octobre 2015. Sa nouvelle rédaction entre en vigueur au 1er janvier 2016 à toutes les instances en cours.

Que nous édicte l’article 267 dans sa nouvelle rédaction ?

« A défaut d’un règlement conventionnel par les époux, le juge statue sur leurs demandes de maintien dans l’indivision, d’attribution préférentielle et d’avance sur part de communauté ou de biens indivis.

Il statue sur les demandes de liquidation et de partage des intérêts patrimoniaux, dans les conditions fixées aux articles 1361 à 1378 du code de procédure civile, s’il est justifié par tous moyens des désaccords subsistant entre les parties, notamment en produisant :

  • Une déclaration commune d’acceptation d’un partage judiciaire, indiquant les points de désaccord entre les époux ;
  • Le projet établi par le notaire désigné sur le fondement du 10° de l’article 255.

Il peut même d’office statuer sur la détermination du régime matrimonial applicable aux époux. »

3 – Apports – Le juge du divorce a désormais les pouvoirs du juge liquidateur, puisqu’il statue dans les conditions fixées aux articles 1361 à 1378 du code de procédure civile, qui sont les règles applicables au partage judiciaire.

Il a ainsi la possibilité de statuer sur l’ensemble de la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des époux.

Sur le fondement de l’article 1361 du code de procédure civil, le juge du divorce peut désormais ordonner le partage s’il peut avoir lieu ou la vente par licitation…

Mais si les parties n’en font pas la demande, le juge peut se cantonner à ne statuer que sur certains points, à savoir l’attribution préférentielle, le maintien dans l’indivision, ou le versement d’avance sur parts de communauté ou de biens indivis.

Ce sera selon les demandes des parties.

4 – Conditions d’application – Cependant, pour que le juge aux affaires familiales saisi du divorce, puisse statuer sur les demandes de liquidation et de partage, il faudra impérativement :

  • Prouver par tout moyen des désaccords subsistants,
  • En produisant notamment :
    . une déclaration commune d’acceptation d’un partage judiciaire, indiquant les points de désaccord entre les époux  ;
    . le projet d’état liquidatif établi par le notaire désigné sur le fondement de l’article 255 du code civil. (Cela prouve l’existence de désaccords subsistants car sinon cet état liquidatif aurait été signé par les parties…)

 5 – Décret du 23 février 2016 – Le Décret du 23 février 2016 modifie l’article 1116 du code de procédure civile destiné à expliquer et préciser les termes de l’article 267 dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 15 octobre 2015.

En effet, qu’est – ce qu’un « désaccord subsistant » ?

Qu’est-ce qu’une « déclaration commune d’acceptation d’un partage judiciaire » ?

6- Conditions de recevabilité – L’article 1116 du code de procédure civile stipule que les demandes visées au 2ème alinéa de l’article 267 du code civil ne sont recevables que si les parties justifient par tous moyens de leurs désaccords subsistants.

L’article 267 du code civil prévoit en effet que le juge statue sur les demandes de liquidation et de partage des intérêts patrimoniaux, dans les conditions fixées aux articles 1361 à 1378 du code de procédure civile seulement SI ’IL EST JUSTIFIE par tous moyens des désaccords subsistant entre les parties.

L’article 1116 du code de procédure civile nous indique donc que cette « justification par tous moyens des désaccords subsistants » est une condition de recevabilité de la demande.

L’article 1116 du code de procédure civile précise également que la « justification par tous moyens des désaccords subsistants » telle que prévue par l’article 267 du code civil, doit intervenir au moment de l’introduction de l’instance.

Seule exception : le projet d’état liquidatif établi par le notaire sur le fondement de l’article 255-10°, qui pourra être « annexé ultérieurement aux conclusions ».

La raison de cette exception est la durée nécessaire à l’accomplissement de la mission du notaire désigné sur le fondement de l’article 255-10°, car à défaut de pouvoir l’annexer ultérieurement, cela aurait bloqué toute assignation en divorce avant la fin de la mission dudit notaire.

7- L’article 1116 du code de procédure civile – aliéna 1 – Ainsi, l’article 1116 du code de procédure civile édicte une sanction à l’absence de justification des désaccords subsistants : l’irrecevabilité.

Il fixe la date à laquelle cette justification des désaccords doit être faite : « au moment de l’introduction de l’instance ». A défaut, là encore, la demande en liquidation partage sera irrecevable.

Surgit une difficulté procédurale : Et si la partie qui souhaite faire des demandes de liquidation et partage est le défendeur ? ….sa demande ne peut nécessairement pas être formulée dans l’acte introductif d’instance, mais seulement dans ses écritures en réponse.

Alors, le doute s’installe : faut-il nécessairement que les deux parties forment des demandes de liquidation et partage pour que le juge du divorce statue sur ces points ?

8 – L’article 1116 du code de procédure civile –  aliéna 2 – Le deuxième alinéa de l’article 1116 du code de procédure civile donne une définition :

1. de la « déclaration commune d’acceptation d’un partage judiciaire» prévue à l’article 267 du code civil :

  • il s’agit d’un écrit signé par les deux époux et leurs avocats respectifs,

2. des « points de désaccords subsistants »

  • ils ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile
    • (Article 4 du cpc : « l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Ces prétentions sont fixées par l’acte introductif d’instance et par les conclusions en défense »)
    • Cela signifie que les demandes des parties doivent être reprises dans l’assignation et les conclusions en défense et que l’on ne peut pas se contenter de renvoyer aux mentions contenues dans la déclaration commune d’acceptation.

 9 – En conclusion –  Les pouvoirs du juge du divorce sont renforcés pour liquider et partager lors du prononcé du divorce, ce qui est une grande avancé.

Le juge du divorce conserve le pouvoir de statuer sur les demandes de maintien dans l’indivision, d’attribution préférentielle et d’avance sur la part de communauté ou de bien indivis.

Le juge lorsqu’il prononce le divorce peut désormais statuer sur les demandes de liquidation et de partage des intérêts patrimoniaux dans les conditions fixées aux articles 1361 à 1378 du code de procédure civile, mais si et seulement si,  il est justifié par tous moyens des désaccords subsistants notamment en produisant une déclaration commune d’acceptation d’un partage judiciaire contenant les points de désaccords ou un projet d’état liquidatif établi par le notaire désigné sur le fondement de l’article 255-10°.

Il s’agit de dispositions complexes mais qui seront redoutablement efficaces.

 

 

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