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Divorce sans juge : communiqué de l’Association Nationale des Avocats Spécialistes et Praticiens en Droit de la Famille

18/05/2016

La déjudiciarisation du divorce est évoquée depuis de nombreuses années et a donné lieu à de multiples rapports qui sont toujours parvenus au même constat : le Juge est le seul garant de l’Ordre public de protection en matière d’état des personnes. Il doit vérifier l’équilibre des intérêts en présence et protéger celui des enfants.

Dans un souci manifeste d’économie budgétaire, le Gouvernement propose cependant d’instaurer un divorce par consentement mutuel sans Juge.

L’amendement prévoit qu’afin de garantir l’équilibre des intérêts en cause, le nouveau divorce sans Juge sera mis en oeuvre par « acte d’avocat » établi par deux avocats, déposé au rang des minutes d’un notaire pour lui conférer date certaine et force exécutoire.

Cette nouvelle catégorie de divorce remplacerait l’ancienne procédure de divorce par consentement mutuel qui n’aurait vocation à subsister que dans l’hypothèse où un enfant mineur demande à être entendu par le Juge.

L’Association nationale des avocats de la famille se réjouit bien sûr de la place ainsi accordée par les pouvoirs publics à l’acte contresigné par avocat et aux avocats, seuls professionnels praticiens du contradictoire, garants à la fois de la qualité, de l’efficacité et de la sécurité juridique, oeuvrant à la résolution pacifiée des conflits conjugaux et parentaux.

Elle est également pleinement consciente des dysfonctionnements actuels de la justice qui conduisent à des difficultés insupportables pour les justiciables en termes d’allongement des délais d’accès au Juge, et à des conditions de travail particulièrement difficiles pour les magistrats chargés du contentieux familial qui, de fait, n’ont plus la possibilité d’exercer pleinement leurs fonctions.

Si de ce point de vue, les objectifs de la réforme sont donc louables, force est cependant de constater que cette dernière ne respecte pas les intérêts des enfants, des justiciables, et de l’ordre public national et international, qui doivent prédominer en toute circonstance.

  • La réforme envisagée est tout d’abord contraire à l’intérêt des enfants et constitue une rupture d’égalité de traitement entre les enfants sous l’autorité parentale de parents mariés ou non mariés.
    Les intérêts des premiers ne seront en effet plus protégés dans tous les cas par l’intervention du Juge, alors que, comme cela a été justement rappelé par les syndicats de magistrats, « l’intérêt d’un enfant n’est pas l’addition des intérêts des deux parents » et que l’audition de l’enfant ne peut être ordonnée lorsqu’il n’est pas en âge de discernement. 
  • Cette réforme est également contraire à l’intérêt des justiciables, en ne leur permettant plus de bénéficier du contrôle du Juge et de faire le choix d’un avocat commun, choix actuellement majoritaire dans les divorces par consentement mutuel et source d’économies importantes pour les justiciables.
  • La réforme envisagée est enfin contraire à l’ordre public international, alors que désormais, les mariages binationaux sont légions, ce à raison de l’absence d’organe de contrôle et de vérification de la compétence internationale et de la loi applicable à toutes les questions liées à la désunion.

De même qu’à raison de l’impossibilité de pouvoir faire reconnaître ou exécuter l’acte à l’étranger, dans l’UE ou hors UE, sans les certifications prévues par la législation européenne dont la délivrance ne peut être confiée ni à l’Avocat ni au Notaire alors que cette mission est dévolue au Juge dans l’espace européen, lequel a d’autre part l’obligation de s’assurer que le mineur a été informé de son droit à être entendu, ce qu’il ne peut faire si le divorce sort de la sphère judiciaire.

Pour une réforme efficace et respectueuse des intérêts des couples mariés et de leurs enfants l’Association des Avocats de la Famille propose que le divorce par consentement mutuel soit établi sous la forme d’un acte d’avocat établi par un ou deux avocats selon le choix des époux, soumis à une simple homologation du Juge lui donnant force exécutoire, sans comparution des époux, lorsqu’il n’existe pas d’enfants mineurs et lorsque l’acte sous signature privée aura été contresigné par deux avocats.

Cette simple homologation permettra d’alléger le travail du Juge, tout en lui conservant son rôle de garant de l’Ordre public de protection.

En revanche, en présence d’enfant(s) mineur(s) la réforme devra prévoir la comparution obligatoire des époux.

De plus, lorsque l’acte sous signature privée aura été contresigné par un seul avocat, la réforme devra donner au Juge la possibilité de faire comparaître les époux.

L’Association Nationale des Avocats spécialistes et praticiens du droit de la famille, des personnes et du patrimoine propose en conséquence la rédaction des dispositions des articles 230 à 232 du Code civil dans les termes suivants :

Art. 230. – « Le divorce peut être demandé conjointement par les époux lorsqu’ils s’entendent sur la rupture du mariage et ses effets en soumettant à l’homologation du juge une convention par acte sous signature privée contresigné par un ou deux avocats, réglant les conséquences du divorce. »
Art. 232. – « Le juge homologue la convention qui lui est soumise sans comparution des parties et prononce le divorce.
Il a toutefois la faculté d’ordonner leur comparution lorsque la convention est contresignée par un seul avocat.
Cette comparution est obligatoire lorsque l’une des parties en fait la demande et dans tous les cas en présence d’enfant mineur.
Il peut refuser l’homologation et ne pas prononcer le divorce s’il constate que la convention qui lui est soumise ne préserve pas suffisamment les intérêts des enfants ou de l’un des époux ».

Association Nationale des Avocats Spécialistes et Praticiens en Droit de la Famille, des Personnes et de leur Patrimoine
Association Loi 1901 à but non-lucratif
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